Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

« Royalistes mais neutres... Voire? | Page d'accueil | Un train peut en cacher un autre »

17/04/2006

Laïcité - Un combat permanent

L'expérience de la laïcité faite depuis 100 ans par les religions et les églises, notamment chrétiennes, et la somme de réflexions qu'elle a provoquée amènent à souligner ce qui, selon elles (les églises), est "leur profond accord sur une vision commune de la laïcité". Cet accord intervient enfin après de durs affrontements consécutifs à la mise en oeuvre de la Loi de 1905. Loi majeure qui pose le principe de laïcité et instaure un régime strict de séparation entre l'Etat et les religions représentées par les églises, groupements religieux et cultes. Loi "traumatisante" vécue "douloureusement" et par l'église et par les catholiques, selon l'expression même du pape Jean-Paul II, dans sa Lettre aux Evêques de France datée du 11 février 2005.

Notre propos n'est pas ici de rallumer la guerre religieuse que sont prêts à relancer à tous instants les boutes-feux de l'intégrisme d'un côté et de la laïcardité de l'autre. Notre but est de montrer que, malgré des propos de l'église catholique se voulant rassurants, le combat de la laïcité reste à gagner. S'il est à peu près admis par la grande majorité des chrétiens de France (catholiques, orthodoxes et protestants) que la laïcité est une très bonne chose, il reste qu'une frange assez importante de ces croyants, alliée, quelques fois dans des alliances contre nature, à d'autres formes de croyance et à toutes les formes de cléricalisme religieux et politique, n'attend que le moment d'enfoncer un coin dans ce fondement républicain qu'est la laïcité à la française.

Le combat de la laïcité a débuté bien avant 1905 puisque déjà en 1516 un premier Concordat fut signé à Bologne entre François Ier roi de France et le pape Léon X. Pour suivre cette histoire passonnante jusque dans ses prolongements modernes : http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/eglise-etat/ch.... Sur le même site on trouvera également l'intégrale du texte de loi dont les deux premiers articles posent le principe moderne de laïcité :

ARTICLE PREMIER. - La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l'intérêt de l'ordre public.

ART. 2.- La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. En conséquence, à partir du 1er janvier qui suivra la promulgation de la présente loi, seront supprimées des budgets de l'État, des départements et des communes, toutes dépenses relatives à l'exercice des cultes. Pourront toutefois être inscrites auxdits budgets les dépenses relatives à des services d'aumônerie et destinées à assurer le libre exercice des cultes dans les établissements publics tels que lycées, collèges, écoles, hospices, asiles et prisons. Les établissements publics du culte sont supprimés, sous réserve des dispositions énoncées à l'article 3. Pour lire la version intégrale du texte de loi : http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/eglise-etat/so...

Selon les paroles même du pape Jean-Paul II cette loi ".../... réglait la façon de vivre en France le principe de laïcité et, dans ce cadre, elle ne maintenait que la liberté de culte, reléguant du même coup le fait religieux dans la sphère du privé et ne reconnaissant pas à la vie religieuse et à l’Institution ecclésiale une place au sein de la société.../..."

Cependant, le pape lui-même apportait, dans sa lettre aux Evêques de France précédemment citée, un adoucissement à ses propos en ajoutant "on sait gré au Gouvernement français lui-même d’avoir (dès 1920) reconnu d’une certaine manière la place du fait religieux dans la vie sociale, la démarche religieuse personnelle et sociale, et la constitution hiérarchique de l’Église, qui est constitutive de son unité".

On comprend mieux ce positionnement du prélat romain lorsqu'on rapproche ses paroles du Code de Droit Canon de l'église romaine en vigueur à l'époque de la promulgation de la loi de 1905 : ".../... Can. 100 - l'Église catholique et le Siège apostolique ont qualité de personnes morales par l’effet de l’ordonnance divine; les autres personnes morales inférieures ont cette qualité dans Église soit par l’effet d’une prescription du droit, soit par une concession donnée par décret formel du supérieur ecclésiastique compétent, dans un but de religion ou de charité.../...". Il est à noter que le nouveau Code de Droit Canon de 1983 rend plus stricte encore cette définition par une très légère modification de forme : ".../... Can. 113 – § 1. L’Église catholique et le Siège Apostolique ont qualité de personnes morales de par l’ordre divin lui-même.../...".

Comment en effet, et ce d'autant que le Concordat de 1801, passé entre le Gouvernement Français et le pape Pie VII, établissait l'église catholique comme la quasi église officielle de la France, s'affirmer être "de par l’ordre divin lui-même" et, en même temps, accepter d'être soumis au droit des sociétés, inférieur par nature à l'ordre divin, voulu, du moins en France démocratique, par les hommes et les femmes qui les composent?

C'est ainsi qu'on va voir, le 8 décembre 2003, au moment de "l'affaire du voile", les trois présidents du Conseil des Églises chrétiennes en France s’adresser au Président de la République, sous couvert d'intégration, pour lui rappeler l’article 18 de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 et l’article 19 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales de 1950 : ".../... Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de fonction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l’enseignement, les pratiques ou l’accomplissement des rites. La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut pas faire l’objet d’aucunes restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l’ordre, de la santé ou de la morale publiques ou à la protection des droits et libertés d’autrui.../...". Qu'il faut bien entendre ici comme une demande du retour du religieux, mais surtout du cléricalisme, dans la vie publique.

Comment définir le cléricalisme? Nous l'avons déjà tenté dans une note précédente par laquelle nous avons montré que le cléricalisme est (selon le Quillet Flammarion) ".../... une doctrine qui tend à donner au clergé un rôle exagéré dans les les affaires temporelles .../...". Nous avons montré que le cléricalisme est une problématique propre à toutes les hiérarchies religieuses ou civiles, qu'elles soient centralisées comme dans l'église romaine ou décentralisées comme dans les églises orthodoxes, les centres religieux islamistes ou autres. La problématique des obédiences maçonniques et de leurs structures technico-administratives fait que les loges et les membres risquent eux aussi de subir une forme de cléricalisme maçonnique. En fait, le cléricalisme n'est rien d'autre que la prétention des technostructures à dire plus de droit, de juste, de bon... que n'en produit la communauté religieuse ou civile de base, à s'ériger en juges et en directrices des consciences, tant au plan collectif qu'à celui de l'individu. A ce titre, les sociétés civiles, dans leurs expressions politiques manifestées par les partis, peuvent aussi connaître des formes de cléricalisme laïc. Il en est ainsi du "laïcisme", qui est juste répartition des rôles dévolus au civil et au religieux, qui peut rapidement dériver en laïcardité sous l'effet des pressions exercées par des groupes radicaux. Entre le "rien n'est laïc" des religieux extrêmes et le "rien n'est religieux" des laïcards, la voie de la laïcité est étroite qui reste toujours un chemin de crêtes a réouvrir chaque jour pour que la paix, civile et religieuse, règne parmi les hommes. A ce titre la laïcité est le combat commun des hommes et des femmes de bonne volonté, avec leurs convictions propres, religieuses ou non, politiques ou non, sans le besoin permanent de les agiter tels les étendards des victoires passées et à venir.  

A suivre

17:50 Publié dans E1- Du cléricalisme | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : culte et spiritualité

Commentaires

Ça s'appellait "le plus petit démonicateur commun" quand le mot "humanités" avait un sens... Y'a du boulôt !...

Écrit par : didier Néel | 09/05/2006

Merci Didier

Nous supposons que vous avez voulu écrire "dénominateur commun"?

Emmanuel

Écrit par : Emmanuel | 09/05/2006

peut-être hors propos, mais n'oublions pas que nous voulons l'homme debout: c'est impardonnable pour qui veut mener les autres. Bien rares sont ceux qui acceptent une autre liberté que la leur. D'où la nécessité de cet espace neutre que doit être la laïcité; espace neutre mais aussi espace de dialogue où l'on n'est pas en droit d'essayer de convaincre l'autre: et ça n'est déjà pas si évident chez nous.....

Écrit par : e. Lebeau | 06/07/2006