16/04/2008
La question de l'avortement et l'anti-maçonnisme.
De l'antimaçonnisme au moyen de la lutte religieuse contre la contraception et l'avortement .
De très nombreuses églises et religions se déclarent, au motifs respectables du droit à la vie et de son respect, opposées aux lois relatives à la contraception et à l'IVG sous le prétexte que ces textes auraient été concoctés dans les loges maçonniques.
Outre que c'est faire injure aux promoteurs de ces textes, notamment Mr Neuwirth et Mme Veil, que de les penser inféodés, à la maçonnerie ou à quelque autre mouvement, il s'agit d'un mensonge grossier, propagé à l'origine par des maçons qui y ont trouvé occasion de se faire mousser à peu de frais.
Il est vrai qu'un ancien Grand Maître d'une des principales obédiences françaises fut, avec d'autres, l'un des artisans de ces évolutions sociétales. Mais il le fut d'abord en raison de ses hautes compétences médicales, internationalement reconnues, sans que son appartenance et ses fonctions maçonniques y soient pour grand chose.
Il y a donc là, aux fins de discréditer les lois consécutives et d'alimenter l'anti-maçonnisme, utilisation abusive et bassement mensongère de la qualité maçonnique d'un homme de grande réputation .
Il est vrai que des maçons se sont exprimé publiquement, de manière individuelle ou collective, sur ces questions de société. Ils ne l'ont fait ni plus ni moins que n'importe quel autre citoyen donnant son sentiment sur tel ou tel aspect de la vie publique. Cela n'implique nullement que des lois soient sorties toutes armées des loges maçonniques.
Force est de constater que là encore les mouvements d'inspiration chrétienne, notamment catholiques, ouvertement soutenus par leurs églises, se font les complices, voire les acteurs propagandistes, de ces mensonges et de cette désinformation qui tient pour rien l'opinion publique et ses évolutions, l'indépendances des élus de la nation qui, comme une partie importante des citoyens, se réclament eux aussi des idéaux chrétiens.
Mettons donc les choses au point :
- L'église catholique, et dans son sillage les autres églises et religions, est (sont) opposée(s) à la contraception pour la raison du droit à la vie, de la vie don de dieu, parce que l'acte sexuel n'a qu'une fin "naturelle", la procréation, qui serait accomplissement de la volonté divine... Tout acte, voire toute intention d'acte, visant à empêcher cette fin est considéré comme faute, péché, crime... Il s'ensuit donc qu'aux yeux des églises et religions seules les relations sexuelles dans le mariage, et à l'intérieur de celui-ci, celles réalisées sans le recours aux méthodes non naturelles (pillule, préservatif...), sont licites.
Il y a là de la part de ces églises et religions une grande hypocrisie puisqu'aussi bien les fameuses méthodes, dites "naturelles", tant recommandées par les cléricaux, essentiellement fondées sur l'observation des cycles mensuels, font elles-mêmes obstacle au "plan divin". Tout comme le font de même les non moins fameuses recommandations papales d'abstinence et de chasteté conjugale ou non.
De même les églises sont opposées à l'interruption volontaire de grossesse médicalement assisté (IVG) au nom des droits précédents. Et ce sans aucune prise en compte des conditions de survenance de la grossesse, de la situation de la famille où elle survient, de celle de la femme, qu'elle soit consentante dans le meilleurs de cas, ou obligé de la subir dans la pupart des cas. On nous objectera que faire un enfant est un acte responsable qui engage toute la personnalité des parents. C'est vrai. Mais la réalité des situations dément depuis des millénaires cette vision idéale.
Prôner comme le font les clercs que la conception est la finalité de l'acte d'amour c'est en fait réduire cet acte à la seule dimension utilitaire de reproduction de l'espèce et c'est tenir pour rien les autres raisons qui interviennent dans la décision plus ou moins consciente de faire un enfant.
De tous temps les hommes ont cherché à contrôler leur fécondité. A tenir un équilibre entre la continuation de l'espèce et la survie immédiate. Ce fut vrai pour les premiers hommes, cueilleurs-chasseurs, pour qui l'enfant était un gage de renforcement du clan en même temps qu'il ne devait pas être un handicap pour sa mobilité dans la recherche de l'indispensable nourriture. Ce l'est encore pour les peuples évolués, dispensés pour beaucoup de l'angoisse alimentaire immédiate, mais toujours confrontés à des conditions de vie quelques fois précaires mais le plus souvent difficiles, voire très difficiles.
De tous temps les femmes ont donc eu recours à l'herbe des anges et à l'avortement. Jusqu'à une date récente la contraception, bien qu'interdite, était admise dès lors qu'elle restait discrète et n'était pas de notoriété publique. Jusqu'à une date récente encore, l'avortement, même s'il était officiellement condamné, règlait bien des drames humains, ou arrangeait bien des intérêts familliaux, dans des arrières cuisines, sous le regard compatissant d'un crucifix, mais au prix d'une terrible boucherie qui condamnait aussi sûrement l'enfant à naître que la mère élevée au rang de criminelle.
Boucherie face à laquelle on n'a pas beaucoup vu les églises et religions, généralement placées du côté des puissants, s'élever avec force, hormis quelques vagues textes, alors qu'on les voit s'ériger en virulents censeurs de lois qui tentent seulement d'apporter un peu d'ordre dans le chao des détresses humaines nées de grossesses non désirées, un peu d'humanité et de sécurité dans un acte où le barbare le disputait souvent au sordide.
Si la contraception doit être considérée comme normale pour assurer les équilibres démographiques, il faut affirmer avec force que l'avortement, sous toutes ses formes et surtout lorsqu'il est utilisé comme moyen contraceptif ordinaire, est un fléau plus que millénaire qui est et qui reste un crime contre la vie humaine.
Ce n'est pas pour autant qu'il faille déplacer le débat sur le terrain de la guerre idéologique à base de projet théocratique et tenir pour rien ni l'état des connaissances scientifiques, ni l'ensemble des situations humaines, sociales, économiques et autres qui peuvent amener un femme, porteuse de la vie, à envisager la supression de cette vie.
Que dit la science à ce sujet? Qu'on ne sait pas déterminer avec précision le moment du passage de l'état d'amas de cellules à l'état d'être humain en gestation. Qu'on ne sait pas dire ce qui les distingue? Est-ce le premier battement de coeur? Autre chose? A cela les religions répondent "est enfant à naître la rencontre née de l'acte d'amour", voire même "dès l'intention des deux parents d'accomplir cet acte" au nom d'une supposée intention divine qui illuminerait l'acte sexuel d'une lumière particulière. Pourquoi pas? Mais alors il faudrait prouver que cette "intention divine" a une quelconque réalité. Prudents, les scientifiques, se basant sur leurs constations, statuent pour la plupart entre 10 et 12 semaines après la rencontre des deux gamètes. Et c'est la limite au delà de laquelle il n'est plus en principe possible de pratiquer un avortement en milieu hospitalier (voir cependant la grande variété des dispositions légales pays par pays).
Ce n'est donc pas sur ce terrain là que doit porter le débat, voire le combat, jusqu'à plus ample information de source divine et/ou scientifique. Le combat doit porter sur ce qui fait la décision d'avortement. Et là on ne peux pas mettre sur le même pied d'égalité la grossesse issue d'un viol, d'un abus de faiblesse, d'un moment de passion amoureuse, voire même de soumission amoureuse. On ne peut pas non plus comparer la gamine irréfléchie et la femme mure sachant se qu'elle fait. Pas plus qu'on ne peut accepter comme équivalentes la situation de détresse d'une femme déjà mère et en situation précaire et celle la femme nantie soucieuse de son apparence et/ou de son confort, la femme peu éduquée et informée et l'intellectuelle parfaitement au courant des moyens contraceptifs "d'avant et d'après"....
D'où la nécessité de faire porter le débat sur l'éducation, l'information, l'aide, l'assistance... mais aussi sur les dispositifs d'accueil de l'enfant à naître, également sur les conditions de vie de la grande majorité des hommes et des femmes de notre temps de telle sorte qu'aucun d'entre eux ne puisse plus être placé devant la nécessité de l'avortement.
Ce n'est donc pas en pratiquant le mensonge et la désinformation, en accusant faussement la FM d'être à l'origine de lois prétenduement iniques, que les églises et religions, lutteront efficacement contre le fléau de l'avortement. On y parviendra au contraire en réunissant les hommes et les femmes de bonne volonté et de toutes origines sur un projet de société "humaniste" au sens le plus élevé du terme.
Mais le veulent-elles? Ne sont-elles pas plutôt portées à instrumentaliser l'avortement pour en faire une machine de guerre contre des sociétés démocratiques, laïques dénoncées par elles comme étant "sans Dieu"? Dieu sur la définition duquel elles ne parviennent d'ailleurs pas à s'entendre et le leur étant évidemment le meilleur.
Il n'est pas sûr que les hommes aient besoin de dieux pour être hommes. Mais assurément "Dieu a besoin des hommes" pour se révéler. Il n'y a pas de révélation possible pour des hommes en désespérance. Il n'y a donc pas de devoir plus impérieux pour le "croyant", quelle que soit sa croyance, que de lutter contre les causes de la désespérance.
Comme disait l'Abbé Pierre "Le ciel oui mais pas sans les hommes".
Dans cette lutte contre la désespérance si des Franc-Maçons ont pu être de quelque utilité, au moyen de propositions de lois de progrès, nous devons, loin des anathèmes, nous en réjouir et travailler ensemble pour améliorer, compléter, rectifier s'il le faut les textes et les moyens afin que les hommes, allégés des fardeaux de la vie, puissent se tourner vers le ciel. Il faudra simplement veiller à ce que chacun puisse librement choisir la couleur de son ciel.
Emmanuel
23:15 Publié dans C0- Antimaçonnisme | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : contraception, avortement, IVG, lois neuwirth, lois veil, anti-maçonnisme, antimaçonnisme