03/11/2010
Lucifer et les Francs-Maçons
C'est une accusation récurente des anti-maçons que de nous attribuer l'adoration de Lucifer comme dieu. Cela vient des anciennes accusations papales de satanisme, reprises récemment du siècle précédent, dans les années 30, par l'évêque Jouin anti-maçon aussi acharné qu'antisémite. Pour ce faire il, et d'autres avec lui, se sont servi d'un faux document attribué à un maçon américain célèbre au XIXème siècle mais malheureusement tombé dans la folie du palladisme et qui décerna à une étoile bien connue des maçons le qualificatif de Lucifer.
Lucifer, Satan, diable, démon, ange(s) déchu(s)... les religions et les pouvoirs ont toujours développé une abondante littérature ayant pour sujet le mal personnifié par une figure démoniaque représentant généralement l'un des attributs du mal.
Le plupart d'entre-elles y ont vu un être crée ou non par la divinité mais toujours opposé à elle et ayant pour vocation la conquête du monde, la possession des hommes, la perversion de leur esprit et de leurs mœurs.
Cependant, le livre des livres des religions monothéistes, la Bible (réf BJ4/ CD-rom), traduite du Tanakh hébraïque en grec 2,5 siècles avant JC par 72 sages (Septantes), ne mentionne pas le nom de Lucifer, ne mentionne que tardivement le nom de Satan (Zacharie 3,1) et celui du diable dans Sagesse (2,24).
C'est Jérôme, le traducteur de la Bible en 385, qui traduira en latin (Vulgate) le mot vjn « NJS » par «le serpent » ou « le Satan » alors que ce mot indique un corps opposant une résistance et plus généralement le vice. Ce n'est qu'en 1546 que le Concile de Trente affirmera l'authenticité de la bible de Jérôme, cependant qu'elle avait été révisée (sic) au VIIIème siècle par Alcuin et Théodulphe, tous deux religieux l'un à Tours, l'autre à Orléans.
Il faut observer que le texte du Tanakh, partiellement attribué à Moïse, se situe au plan des principes d'humanité et non de l'humanité réelle ce que, semble-t-il, les traducteurs et réformateurs de la Bible n'ont pas compris ou voulu traduire pour ne pas remettre en cause la doctrine du péché originel. Doctrine officialisée en dogme par le Concile d'Orange sur lequel l'église romaine a fondé, à la suite de saint Augustin (IVème siècle), tout son système de domination des êtres et des pensées.
Si l'on examine l'origine des mots qualifiant le mal, le vice on voit que Lucifer désigne chez les Romains « l'Étoile du matin et du soir » soit « Vénus » (mais Vesper pour l'étoile du soir). Chez les Grec Lucifer est Phosphoros. En latin comme en Grec ce mot signifie « qui porte la Lumière ». Dans la Septante, on lit ὁ ἑωσφόρος ὁ πρωὶ ἀνατέλλων, qui signifie « le porteur d'aurore, celui qui se lève le matin ». Ce texte fait référence à un roi de Babylone qui aurait dit : « J'escaladerai les cieux, au-dessus des étoiles de Dieu j'élèverai mon trône, je siégerai sur la montagne de l'Assemblée, aux confins du septentrion. Je monterai au sommet des nuages, je m'égalerai au Très-Haut. » (Isaïe 13 et 14). C'est encore Jérôme qui utilisera abusivement le mot Lucifer pour traduire en latin le verset 14,12 « Comment es-tu tombé du ciel, étoile du matin (Lucifer), fils de l'aurore? As-tu été jeté à terre, vainqueur des nations? ».
La tradition chrétienne des origines attribue ce qualificatif à Jésus lui-même. Dans le Nouveau Testament, il y a une mention de φωσφόρος, « porteur de lumière », « Et nous tenons pour d'autant plus certaine la parole prophétique, à laquelle vous faites bien de prêter attention, comme à une lampe qui brille dans un lieu obscur, jusqu'à ce que le jour vienne à paraître et que l'étoile du matin (Lucifer) se lève dans vos cœurs » (Pierre 2:1:19)
Dans l'Apocalypse (Jean 22:16) Jésus se décrit comme ὁ ἀστὴρ ὁ λαμπρὸς ὁ πρωϊνός, « l'étoile du matin ». On peut trouver un écho de cet usage dans l'Exultet, le chant liturgique par lequel l'église romaine, durant la veillée pascale du Samedi saint, proclame l'irruption de la lumière dans les ténèbres, symbolisée par celle du cierge pascal qui vient d'être allumé.
Dans le Coran, la sourate 86 Al Tariq parle également de l'étoile du matin, et pourrait évoquer le Messie, Al Tariq signifiant à la fois l'étoile du matin et celui qui vient dans la nuit.
C'est un Apocryphe, le Livre d'Enock, qui crée le mythe des anges rebelles. Mais c'est le Moyen-Age qui fera de Lucifer un ange rebelle, déchu, tentateur, diviseur, roi des démons... et lui donnera ses représentations dont la plus connue est celle d'un diable rouge ou noir, cornu, aux pieds de bouc... C'est ainsi que naîtra la fiction bien arrangeante de Lucifer = Satan = diable = démon... dont l'église romaine fera le tentateur de l'humanité.
En fait, si l'on y regarde bien, Lucifer peut être assimilé à Prométhée qui, dérobant aux dieux le feu du ciel, apporte aux hommes la connaissance et les science. On sait que Prométhée subit le châtiment de son forfait en étant attaché au Caucase et livré à la rapacité des corbeaux, vautours et autres bestioles qui lui dévorèrent le foie.
De ce point de vue Jésus est aussi un héros prométhéen qui apporte aux hommes la connaissance de la nouvelle loi fondée sur l'Amour alors que l'ancienne loi, à laquelle peut être rattaché Prométhée, est fondée sur la contrainte qu'impose un dieu jaloux. Et l'on sait ce que les prêtres juifs (symbolisant toute cléricalité et non le peuple juif comme le laissent entendre les racistes religieux ou non) ont fait subir de supplices à cet Etre de Lumière, fils de Dieu et fils de l'homme.
Loin donc d'être infamante l'accusation de luciférisme portée contre les Francs-Maçons à la suite des déclarations délirantes d'un Albert PIKE, vieillissant et tombé dans la folie du palladisme, tout au contraire de ce qu'affirment nos adversaires, nous honore puisque nous nous qualifions nous-mêmes de « Fils de la Lumière », que nous avons pour ambition de porter au monde « la lumière reçue au cœur de nos loges », « de rassembler ce qui est épars » de n'être « ni athées stupides ni libertins irreligieux »...
Cependant, si la Franc-Maçonnerie proclame l'existence d'un Principe Créateur sous le nom de Grand Architecte de l'Univers qui donne à l'homme le bien le plus précieux qui soit : La Liberté, don, transmission qui font ainsi du Créateur un "Etre" présent, pensant et agissant, nous devons rappeler avec force que la Franc-Maçonnerie n'adore aucun dieu, ne rend aucun culte, ne délivre aucun sacrement, ne propose aucune forme de salut, de paradis, de récompense ultime.
Néanmoins, la Franc-Maçonnerie porte les valeurs qui découlent de l'Espérance révélée par ce que la réalité du monde inspire de sens, de la Foi en un perfectionnement infini de l'homme et de l'humanité, de la Charité comme attention, assistance, amour portée à l'humanité et à chaque homme.
Réjouissons-nous donc mes Frères et Sœurs de ce que Jésus - "Etoile du Matin" selon les saints Pierre et Jean et donc "Lucifer" selon la traduction de cette expression par saint Jérôme - nous soit l'une des « Grandes Lumières de l'humanité », celui qui a «initié la plus belle religion du monde », le « médiateur entre l'humanité et le Principe Créateur », de ce qu'il nous a donné « la Loi d'Amour ». Réjouissons-nous encore de ce que la Franc-Maçonnerie traditionelle proclame, comme à son origine, l'existence d'un Principe Créateur qu'elle laisse à ses membres le soin de définir selon leur coeur, que nos travaux soient ouverts « A la Gloire du Grand Architecte de l'Univers » en présence de la Bible ouverte au Prologue de l'Évangile de Jean qui commence par ces mots « Au Commencement était le Verbe... qui était avec Dieu... qui était Dieu... qui était la Lumière Véritable… qui éclairait les Hommes... qui ne l'ont pas reconnue ».
Prométhée, Lucifer, Jésus...
et nous, petits hommes éclairés par leur Lumière,
animés par la Foi, la Charité et l'Espérance,
même combat contre l'ignorance, l'ambition, le fanatisme.
Mais qu'on ne fasse pas un mauvais procès d'intention. Nous savons et reconnaissons qu'il y a dans toutes les religions des croyants laïcs ou clercs qui sont à l'opposé de ces tares de la société et qui ont exercé ou exercent encore une influence positive sur la marche du monde. Ceux là sont l'objet de notre respect.
Voir aussi : http://lodgamour.blogspirit.com/archive/2014/05/21/lucife...
17:43 Publié dans Présentation | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : franc-maçonnerie, religion, sectes, lucifer, francs-maçons, églises, église, christianisme
30/04/2008
Extrait d'un ancien rituel dit "de Berne" (vers 1740)
Extrait d'un texte maçonnique publié au début du 20ème siècle divulguant un rituel maçonnique très ancien puisque daté par les spécialistes de 1740 environ (soit en même temps ou presque que la première condamnation papale de Clément XII - In Eminenti - 1738)
L'article extrait et présenté ici ne devait être lu qu'aux candidats catholiques romains.
".../... A l'Egard du scrupule que bien des gens ont conçû au sujet des Censures Ecclesiastiques, que l'on pretend étre lancées contre Nous, cet Objet ne doit pas inquieter lorsqu'on veût y reflechir, sans vouloir se soustraire à l'Obéissance du St-Siege, il est permis de Connoitre jusques ou vâ son pouvoir sur tout, lorsque l'on puise la Regle de son Jugement dans les Sts-Canons, qui font eux memes toutte l'Authorité du Souverain Pontife; Or nous apprenons par ces Canons qu'une Excommunication ne peût etre valable qu'autant qu'elle a été portée en Connoissance de Cause, attendû que le Mal ne se suppose point, etant surs comme Nous Sommes que le Pape n'a pas crû etre instruit de ce qui se passe parmi Nous, Nous sommes deja convenûs que l'Excommunication est nulle de plein Droit, puis qu'elle à manqué du Moyen necessaire pr. la fonder, mais à supposer que sous le Titre de Censure Conditionnelle elle puisse avoir quelque force, notre Conscience dans ce Cas est notre veritable Refuge, et puis qu'elle ne nous reproche rien, nous devons en etre parfaitement tranquilles.../...".
On ne peut être plus clair. Nous pouvons donc considérer comme nulles toutes les condamnations qui ont repris cette condamnation de Clément XII y compris la dernière sous la plume de J. Ratzinger. Et nous pouvons aussi considérer comme "faux témoins" tous les papes, cardinaux et évêques successifs qui ont fulminé contre la maçonnerie sans être plus instruits que leur prédécesseur Clément.
Emmanuel
15:05 Publié dans A1- Franc-Maçonnerie - Présentation | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : anti-maçonnisme, franc-maçonnerie, pape, vatican, catholiques, églises, évêques