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17/11/2015

Lettre ouverte au monde musulman

Quelques jours après les attentats qui ont endeuillé Paris, la France et le Monde entier... alors que de nombreux discours, d'écrits, de posts... tendent à jeter le discrédit sur la religion musulmane nous pensons faire oeuvre utile en reproduisant ci-dessous le très beau texte d'un penseur musulman.

Puisse-t-il inspirer tous nos lecteurs et bien au delà pour que s'établisse enfin sur notre monde le règne de l'Amour, de la Paix et de la Joie d'être ensemble dans nos diversités.

Source : http://quebec.huffingtonpost.ca/abdenno ... 91640.html

d'Abdennour Bidar

(Philosophe spécialiste des évolutions contemporaines de l'islam et des théories de la sécularisation et post-sécularisation).

Cher monde musulman, je suis un de tes fils éloignés qui te regarde du dehors et de loin - de ce pays de France où tant de tes enfants vivent aujourd'hui. Je te regarde avec mes yeux sévères de philosophe nourri depuis son enfance par le taçawwuf (soufisme) et par la pensée occidentale. Je te regarde donc à partir de ma position de barzakh, d'isthme entre les deux mers de l'Orient et de l'Occident!

Et qu'est-ce que je vois ? Qu'est-ce que je vois mieux que d'autres sans doute parce que justement je te regarde de loin, avec le recul de la distance ? Je te vois toi, dans un état de misère et de souffrance qui me rend infiniment triste, mais qui rend encore plus sévère mon jugement de philosophe ! Car je te vois en train d'enfanter un monstre qui prétend se nommer État islamique et auquel certains préfèrent donner un nom de démon : DAESH. Mais le pire est que je te vois te perdre - perdre ton temps et ton honneur - dans le refus de reconnaître que ce monstre est né de toi, de tes errances, de tes contradictions, de ton écartèlement interminable entre passé et présent, de ton incapacité trop durable à trouver ta place dans la civilisation humaine.

Que dis-tu en effet face à ce monstre ? Quel est ton unique discours ? Tu cries « Ce n'est pas moi ! », « Ce n'est pas l'islam ! ». Tu refuses que les crimes de ce monstre soient commis en ton nom (hashtag #NotInMyName). Tu t'indignes devant une telle monstruosité, tu t'insurges aussi que le monstre usurpe ton identité, et bien sûr tu as raison de le faire. Il est indispensable qu'à la face du monde tu proclames ainsi, haut et fort, que l'islam dénonce la barbarie. Mais c'est tout à fait insuffisant ! Car tu te réfugies dans le réflexe de l'autodéfense sans assumer aussi, et surtout, la responsabilité de l'autocritique. Tu te contentes de t'indigner, alors que ce moment historique aurait été une si formidable occasion de te remettre en question ! Et comme d'habitude, tu accuses au lieu de prendre ta propre responsabilité : « Arrêtez, vous les occidentaux, et vous tous les ennemis de l'islam de nous associer à ce monstre ! Le terrorisme, ce n'est pas l'islam, le vrai islam, le bon islam qui ne veut pas dire la guerre, mais la paix! »

J'entends ce cri de révolte qui monte en toi, ô mon cher monde musulman, et je le comprends. Oui tu as raison, comme chacune des autres grandes inspirations sacrées du monde l'islam a créé tout au long de son histoire de la Beauté, de la Justice, du Sens, du Bien, et il a puissamment éclairé l'être humain sur le chemin du mystère de l'existence... Je me bats ici en Occident, dans chacun de mes livres, pour que cette sagesse de l'islam et de toutes les religions ne soit pas oubliée ni méprisée ! Mais de ma position lointaine, je vois aussi autre chose - que tu ne sais pas voir ou que tu ne veux pas voir... Et cela m'inspire une question, LA grande question : pourquoi ce monstre t'a-t-il volé ton visage ? Pourquoi ce monstre ignoble a-t-il choisi ton visage et pas un autre ? Pourquoi a-t-il pris le masque de l'islam et pas un autre masque ? C'est qu'en réalité derrière cette image du monstre se cache un immense problème, que tu ne sembles pas prêt à regarder en face. Il le faut bien pourtant, il faut que tu en aies le courage.

Ce problème est celui des racines du mal. D'où viennent les crimes de ce soi-disant « État islamique » ? Je vais te le dire, mon ami. Et cela ne va pas te faire plaisir, mais c'est mon devoir de philosophe. Les racines de ce mal qui te vole aujourd'hui ton visage sont en toi-même, le monstre est sorti de ton propre ventre, le cancer est dans ton propre corps. Et de ton ventre malade, il sortira dans le futur autant de nouveaux monstres - pires encore que celui-ci - aussi longtemps que tu refuseras de regarder cette vérité en face, aussi longtemps que tu tarderas à l'admettre et à attaquer enfin cette racine du mal !

Même les intellectuels occidentaux, quand je leur dis cela, ont de la difficulté à le voir : pour la plupart, ils ont tellement oublié ce qu'est la puissance de la religion - en bien et en mal, sur la vie et sur la mort - qu'ils me disent « Non le problème du monde musulman n'est pas l'islam, pas la religion, mais la politique, l'histoire, l'économie, etc. ». Ils vivent dans des sociétés si sécularisées qu'ils ne se souviennent plus du tout que la religion peut être le cœur du réacteur d'une civilisation humaine ! Et que l'avenir de l'humanité passera demain non pas seulement par la résolution de la crise financière et économique, mais de façon bien plus essentielle par la résolution de la crise spirituelle sans précédent que traverse notre humanité toute entière ! Saurons-nous tous nous rassembler, à l'échelle de la planète, pour affronter ce défi fondamental ? La nature spirituelle de l'homme a horreur du vide, et si elle ne trouve rien de nouveau pour le remplir elle le fera demain avec des religions toujours plus inadaptées au présent - et qui comme l'islam actuellement se mettront alors à produire des monstres.

Je vois en toi, ô monde musulman, des forces immenses prêtes à se lever pour contribuer à cet effort mondial de trouver une vie spirituelle pour le XXIe siècle ! Il y a en toi en effet, malgré la gravité de ta maladie, malgré l'étendue des ombres d'obscurantisme qui veulent te recouvrir tout entier, une multitude extraordinaire de femmes et d'hommes qui sont prêts à réformer l'islam, à réinventer son génie au-delà de ses formes historiques et à participer ainsi au renouvellement complet du rapport que l'humanité entretenait jusque-là avec ses dieux ! C'est à tous ceux-là, musulmans et non musulmans qui rêvent ensemble de révolution spirituelle, que je me suis adressé dans mes livres ! Pour leur donner, avec mes mots de philosophe, confiance en ce qu'entrevoit leur espérance!

Il y a dans la Oumma (communauté des musulmans) de ces femmes et ces hommes de progrès qui portent en eux la vision du futur spirituel de l'être humain. Mais ils ne sont pas encore assez nombreux ni leur parole assez puissante. Tous ceux-là, dont je salue la lucidité et le courage, ont parfaitement vu que c'est l'état général de maladie profonde du monde musulman qui explique la naissance des monstres terroristes aux noms d'Al Qaida, Al Nostra, AQMI ou de l'«État islamique». Ils ont bien compris que ce ne sont là que les symptômes les plus graves et les plus visibles sur un immense corps malade, dont les maladies chroniques sont les suivantes: impuissance à instituer des démocraties durables dans lesquelles est reconnue comme droit moral et politique la liberté de conscience vis-à-vis des dogmes de la religion; prison morale et sociale d'une religion dogmatique, figée, et parfois totalitaire ; difficultés chroniques à améliorer la condition des femmes dans le sens de l'égalité, de la responsabilité et de la liberté; impuissance à séparer suffisamment le pouvoir politique de son contrôle par l'autorité de la religion; incapacité à instituer un respect, une tolérance et une véritable reconnaissance du pluralisme religieux et des minorités religieuses.

Tout cela serait-il donc la faute de l'Occident ? Combien de temps précieux, d'années cruciales, vas-tu perdre encore, ô cher monde musulman, avec cette accusation stupide à laquelle toi-même tu ne crois plus, et derrière laquelle tu te caches pour continuer à te mentir à toi-même ? Si je te critique aussi durement, ce n'est pas parce que je suis un philosophe « occidental », mais parce que je suis un de tes fils conscients de tout ce que tu as perdu de ta grandeur passée depuis si longtemps qu'elle est devenue un mythe !

Depuis le XVIIIe siècle en particulier, il est temps de te l'avouer enfin, tu as été incapable de répondre au défi de l'Occident. Soit tu t'es réfugié de façon infantile et mortifère dans le passé, avec la régression intolérante et obscurantiste du wahhabisme qui continue de faire des ravages presque partout à l'intérieur de tes frontières - un wahhabisme que tu répands à partir de tes lieux saints de l'Arabie Saoudite comme un cancer qui partirait de ton cœur lui-même ! Soit tu as suivi le pire de cet Occident, en produisant comme lui des nationalismes et un modernisme qui est une caricature de modernité - je veux parler de cette frénésie de consommation, ou bien encore de ce développement technologique sans cohérence avec leur archaïsme religieux qui fait de tes « élites » richissimes du Golfe seulement des victimes consentantes de la maladie désormais mondiale qu'est le culte du dieu argent.

Qu'as-tu d'admirable aujourd'hui, mon ami ? Qu'est-ce qui en toi reste digne de susciter le respect et l'admiration des autres peuples et civilisations de la Terre ? Où sont tes sages, et as-tu encore une sagesse à proposer au monde ? Où sont tes grands hommes, qui sont tes Mandela, qui sont tes Gandhi, qui sont tes Aung San Suu Kyi ? Où sont tes grands penseurs, tes intellectuels dont les livres devraient être lus dans le monde entier comme au temps où les mathématiciens et les philosophes arabes ou persans faisaient référence de l'Inde à l'Espagne ? En réalité tu es devenu si faible, si impuissant derrière la certitude que tu affiches toujours au sujet de toi-même... Tu ne sais plus du tout qui tu es ni où tu veux aller et cela te rend aussi malheureux qu'agressif... Tu t'obstines à ne pas écouter ceux qui t'appellent à changer en te libérant enfin de la domination que tu as offerte à la religion sur la vie toute entière. Tu as choisi de considérer que Mohammed était prophète et roi. Tu as choisi de définir l'islam comme religion politique, sociale, morale, devant régner comme un tyran aussi bien sur l'État que sur la vie civile, aussi bien dans la rue et dans la maison qu'à l'intérieur même de chaque conscience. Tu as choisi de croire et d'imposer que l'islam veut dire soumission alors que le Coran lui-même proclame qu'«Il n'y a pas de contrainte en religion» (La ikraha fi Dîn). Tu as fait de son Appel à la liberté l'empire de la contrainte ! Comment une civilisation peut-elle trahir à ce point son propre texte sacré ? Je dis qu'il est l'heure, dans la civilisation de l'islam, d'instituer cette liberté spirituelle - la plus sublime et difficile de toutes - à la place de toutes les lois inventées par des générations de théologiens !

De nombreuses voix que tu ne veux pas entendre s'élèvent aujourd'hui dans la Oumma pour s'insurger contre ce scandale, pour dénoncer ce tabou d'une religion autoritaire et indiscutable dont se servent ses chefs pour perpétuer indéfiniment leur domination... Au point que trop de croyants ont tellement intériorisé une culture de la soumission à la tradition et aux « maîtres de religion » (imams, muftis, shouyoukhs, etc.) qu'ils ne comprennent même pas qu'on leur parle de liberté spirituelle, et n'admettent pas qu'on ose leur parler de choix personnel vis-à-vis des « piliers » de l'islam. Tout cela constitue pour eux une « ligne rouge », quelque chose de trop sacré pour qu'ils osent donner à leur propre conscience le droit de le remettre en question ! Et il y a tant de ces familles, tant de ces sociétés musulmanes où cette confusion entre spiritualité et servitude est incrustée dans les esprits dès leur plus jeune âge, et où l'éducation spirituelle est d'une telle pauvreté que tout ce qui concerne de près ou de loin la religion reste ainsi quelque chose qui ne se discute pas!

Or cela, de toute évidence, n'est pas imposé par le terrorisme de quelques fous, par quelques troupes de fanatiques embarqués par l'État islamique. Non, ce problème-là est infiniment plus profond et infiniment plus vaste ! Mais qui le verra et le dira ? Qui veut l'entendre ? Silence là-dessus dans le monde musulman, et dans les médias occidentaux on n'entend plus que tous ces spécialistes du terrorisme qui aggravent jour après jour la myopie générale ! Il ne faut donc pas que tu t'illusionnes, ô mon ami, en croyant et en faisant croire que quand on en aura fini avec le terrorisme islamiste l'islam aura réglé ses problèmes ! Car tout ce que je viens d'évoquer - une religion tyrannique, dogmatique, littéraliste, formaliste, machiste, conservatrice, régressive - est trop souvent, pas toujours, mais trop souvent, l'islam ordinaire, l'islam quotidien, qui souffre et fait souffrir trop de consciences, l'islam de la tradition et du passé, l'islam déformé par tous ceux qui l'utilisent politiquement, l'islam qui finit encore et toujours par étouffer les Printemps arabes et la voix de toutes ses jeunesses qui demandent autre chose. Quand donc vas-tu faire enfin ta vraie révolution ? Cette révolution qui dans les sociétés et les consciences fera rimer définitivement religion et liberté, cette révolution sans retour qui prendra acte que la religion est devenue un fait social parmi d'autres partout dans le monde, et que ses droits exorbitants n'ont plus aucune légitimité !

Bien sûr, dans ton immense territoire, il y a des îlots de liberté spirituelle : des familles qui transmettent un islam de tolérance, de choix personnel, d'approfondissement spirituel ; des milieux sociaux où la cage de la prison religieuse s'est ouverte ou entrouverte ; des lieux où l'islam donne encore le meilleur de lui-même, c'est-à-dire une culture du partage, de l'honneur, de la recherche du savoir, et une spiritualité en quête de ce lieu sacré où l'être humain et la réalité ultime qu'on appelle Allâh se rencontrent. Il y a en Terre d'islam et partout dans les communautés musulmanes du monde des consciences fortes et libres, mais elles restent condamnées à vivre leur liberté sans assurance, sans reconnaissance d'un véritable droit, à leurs risques et périls face au contrôle communautaire ou bien même parfois face à la police religieuse. Jamais pour l'instant le droit de dire « Je choisis mon islam », « J'ai mon propre rapport à l'islam » n'a été reconnu par « l'islam officiel » des dignitaires. Ceux-là au contraire s'acharnent à imposer que « La doctrine de l'islam est unique » et que « L'obéissance aux piliers de l'islam est la seule voie droite » (sirâtou-l-moustaqîm).

Ce refus du droit à la liberté vis-à-vis de la religion est l'une de ces racines du mal dont tu souffres, ô mon cher monde musulman, l'un de ces ventres obscurs où grandissent les monstres que tu fais bondir depuis quelques années au visage effrayé du monde entier. Car cette religion de fer impose à tes sociétés tout entières une violence insoutenable. Elle enferme toujours trop de tes filles et tous tes fils dans la cage d'un Bien et d'un Mal, d'un licite (halâl) et d'un illicite (harâm) que personne ne choisit, mais que tout le monde subit. Elle emprisonne les volontés, elle conditionne les esprits, elle empêche ou entrave tout choix de vie personnel. Dans trop de tes contrées, tu associes encore la religion et la violence - contre les femmes, contre les « mauvais croyants », contre les minorités chrétiennes ou autres, contre les penseurs et les esprits libres, contre les rebelles - de telle sorte que cette religion et cette violence finissent par se confondre, chez les plus déséquilibrés et les plus fragiles de tes fils, dans la monstruosité du jihad !

Alors, ne t'étonne donc pas, ne fais plus semblant de t'étonner, je t'en prie, que des démons tels que le soi-disant État islamique t'aient pris ton visage ! Car les monstres et les démons ne volent que les visages qui sont déjà déformés par trop de grimaces ! Et si tu veux savoir comment ne plus enfanter de tels monstres, je vais te le dire. C'est simple et très difficile à la fois. Il faut que tu commences par réformer toute l'éducation que tu donnes à tes enfants, que tu réformes chacune de tes écoles, chacun de tes lieux de savoir et de pouvoir. Que tu les réformes pour les diriger selon des principes universels (même si tu n'es pas le seul à les transgresser ou à persister dans leur ignorance) : la liberté de conscience, la démocratie, la tolérance et le droit de cité pour toute la diversité des visions du monde et des croyances, l'égalité des sexes et l'émancipation des femmes de toute tutelle masculine, la réflexion et la culture critique du religieux dans les universités, la littérature, les médias. Tu ne peux plus reculer, tu ne peux plus faire moins que tout cela ! Tu ne peux plus faire moins que ta révolution spirituelle la plus complète ! C'est le seul moyen pour toi de ne plus enfanter de tels monstres, et si tu ne le fais pas tu seras bientôt dévasté par leur puissance de destruction. Quand tu auras mené à bien cette tâche colossale - au lieu de te réfugier encore et toujours dans la mauvaise foi et l'aveuglement volontaire, alors plus aucun monstre abject ne pourra plus venir te voler ton visage.

Cher monde musulman... Je ne suis qu'un philosophe, et comme d'habitude certains diront que le philosophe est un hérétique. Je ne cherche pourtant qu'à faire resplendir à nouveau la lumière - c'est le nom que tu m'as donné qui me le commande, Abdennour, « Serviteur de la Lumière ».

Je n'aurais pas été si sévère dans cette lettre si je ne croyais pas en toi. Comme on dit en français: «Qui aime bien châtie bien». Et au contraire tous ceux qui aujourd'hui ne sont pas assez sévères avec toi - qui te trouvent toujours des excuses, qui veulent faire de toi une victime, ou qui ne voient pas ta responsabilité dans ce qui t'arrive - tous ceux-là en réalité ne te rendent pas service ! Je crois en toi, je crois en ta contribution à faire demain de notre planète un univers à la fois plus humain et plus spirituel ! Salâm, que la paix soit sur toi.

Merci Monsieur.

 

15/12/2009

A nos amis Mohamed et Aïcha

Lettre ouverte à nos amis Mohamed et Aïcha. Mais aussi à tous ceux qui nés récemment en France ont des origines lointaines. Et encore à tous ceux qui viennent d'arriver dans notre pays après un long et souvent difficile voyage.

Selon un sondage IPSOS/La Croix:

5,7% des français sont des musulmans fréquentant la mosquée au moins une fois par semaine

et,

5,3% des français sont des catholiques se rendant au moins une fois par semaine à l'église

alors que

64,7% des français se déclarent catholiques

et,

9,5% des français se déclarent musulmans.

Si l'on prend la pratique religieuse "une fois par semaine" comme critère de la régularité religieuse on voit que 89% des français sont : ou des pratiquants occasionnels ou pratiquant d'une autre religion, non chrétienne ou musulmane, ou sont athées ou agnostiques (notons que la troisième religion de France est le judaïme qui compterait de l'ordre de 50 000 pratiquants réguliers).

Cela veut donc dire que l'indifférentisme religieux est la religion la plus représentée de France alors que les pratiquants assidus des religions très largement minoritaires, y compris dans leurs propres obédiences religieuses, sont parmi les plus bruyants à faire entendre leurs voix d'ailleurs discordantes.

Alors s'il vous plait, que vous soyez enturbannées ou encalottés, UN PEU DE SILENCE! Ceux qui croient un peu, autrement ou pas du tout, en un mot tous les gens censés, ne s'entendent plus réfléchir.

Depuis l'offensive ratée des troupes arabes, ayant pris la déculottée qu'on sait près de Poitiers, en 732 de notre ère, grâce au bons soins du très chrétien Charles Martel, la France est un pays chrétien qui a assez généreusement assimilé de nombreuses vagues d'immigration. Immigration, il est vrai de le rappeler, d'origine plutôt catholique (Portugais, Espagnols, Italiens, Polonais...) mais aussi d'origine religieuse Juive, Orthodoxe, Orientale avec les Arméniens notamment, et autres immigrés fuyants les persécutions arabes et ottomanes, les progroms religieux ou politico-économiques, les conflits qui ont ensanglanté l'Europe. Plus tard, elle a reçu ceux qui, recherchant une vie meilleure et/ou voulant être ou rester Français, venaient d'Algérie et des anciens protectorats, d'Afrique, d'Asie et de bien d'autres lieux lointains. Et tout ça après avoir reçu l'héritage des Francs et autres Huns ou Wisigoths, des Romains aussi et, plus loin encore, des Grecs. Elle a même réussi à réconcilier ensemble les catholiques et les protestants et, jusqu'à une date récente, à faire vivre à peu près en paix toutes ces communautés. Communautés qui ont fait et font encore sa richesse et qui, au cours des deux dernières grandes guerres, ont versé le prix du sang auprès des "gaulois" et des chrétiens de souche, si tant est qu'après tant de mariages croisés le sang original ait conservé quelque chose de gaulois ailleurs que dans la paillardise légendaire du français.

Nous avons écrit "jusqu'à une date récente" car en effet, amis Mohamed et Aïcha, Africains du nord, de la grande Afrique dite noire ou d'ailleurs, il semble bien que depuis quelque temps vous poussiez un peu le bouchon. Pas une semaine où un fait divers impliquant de vos co-religionnaires ou co-nationaux apparaisse. Crimes de sang, délits divers en gravité et variété, mépris des lois de la République et de ses représentants... de son peuple. Mais nous savons aussi, et nous affirmons, que tout ce qui va de travers dans le pays ne vous est pas imputable loin s'en faut. Le problème est que, pour beaucoup comme nous qui faisons la part de choses, d'autres ne la font pas, par inintelligence, pire par calcul, et s'en servent pour ajouter au "bordel" ambiant né aussi du changement de société auquel nous assitons et participons peu ou prou.

Certes, la France fut une grande nation chrétienne, il paraît même qu'elle fut la "fille ainée" de l'église romaine dite catholique par elle-même. En témoigne l'immense patrimoine architectural et artistique qui est notre bien commun et dans lequels "le clocher" est la signature de la foi de nos anciens et de l'ambition d'une chrétienté "dominante et sûre d'elle". Mais de nos jours, et le temps ayant fait son oeuvre de nivellement, qu'on s'en réjouisse ou qu'on le déplore, l'église romaine (qui ne représente pas la totalité de la Chrétienté) a vu ses ambition singulièrement rabotées.

Alors, amis de toutes sortes, venus d'ailleurs, et en particulier musulmans, que vous soyez issus d'une immigration ancienne ou récente, ou même simplement de passage, s'il est juste que vous puissiez librement pratiquer votre religion et les cultes qui s'y rattachent, voire même une différenciation de bon aloi, n'imitez pas ces trous du cul d'extrémistes politiques de tous bords qui ne rêvent que flanquer le feu à la maison, ces catholiques des temps anciens qui, si leurs groupes extrémistes ou les inclinations d'écclésiastiques rétrogrades continuent dans le radicalisme, finiront eux aussi par se réunir dans une cabine téléphonique comme d'autres l'ont déjà connu.

Ecoutez au contraire ce que vous dit la majorité des braves gens biens de ce pays.

Nous sommes en France une très grande majorité de "souchiens", comme nous a récemment qualifiés une de vos co-religionnaires qui, se voulant insultante s'est montrée minable, tout simplement parce qu'elle a oublié que nous avons tout lieu d'être fiers des racines de notre pays, de son histoire, de sa culture diversifiée, des hommes et des femmes qui l'ont fait et le font encore, parmi lesquels il y eut, et il y a encore des musulmans et des étrangers, que nous sommes prêts à vous accueillir, à appuyer votre volonté d'intégration, à faire en sorte que vos droits légitimes à des conditions de vies décentes soient reconnus et respectés, que votre liberté de culte le soit aussi.

Mais comprenez que nous sommes d'un vieux pays, de forte tradition culturelle et religieuse même si, comme le montre les chiffres, la religion tient une place seconde dans nos préoccupations. Comprenez que le peuple français est profondément attaché à ce fondamental du vivre ensemble qu'est la Laïcité. Que nous ne pourrons pas accepter que cela soit remis en cause par quelques excités du turban et de la burqua ou de la calotte et de la soutane.

Vous êtes chez-nous. Soyez chez-vous avec nous.

Vos mosquées et salles de prières ont droit de cité. Mais, surtout, n'opposez pas vos minarets à nos clochers, votre charia à notre charité. Vos immams chantant vos belles hymnes à la gloire de Dieu ne sont pas que des cloches qui appellent à la prière.

Ne confondez donc pas chant du muezzin et appel à la désobéissance civile. Nos cloches peuvent aussi avoir une voix profane, et elles l'ont déjà fait, sonner le tocsin.

Nous sommes allés nous aussi à bonne école. Nous avons appris avec le catholicisme que la religion peut ne pas être que religieuse. Qu'elle peut aussi être ambition politique.

Sachez donc que nous ne sommes pas dupes du fait que l'Islam n'est pas que religieux et qu'il est aussi projet politique qui vise à faire de la terre entière un monde islamisé. Un monde soumis à des lois dont dont nous avons mis plusieurs siècles à nous défaire, dont nous récusons le bien fondé à l'époque qui est la nôtre, dans la société pétrie d'humanisme qui est la nôtre,  

Alors ne confondez pas mosquées et masqués. Avancez à visage découvert. Puisqu'expurgé de ces sourates ajoutée par des fous assassins au Coran, votre religion est une religion de paix et de tolérance.

Nous savons aussi que le costume peut faire signe.

Nos religieuses et religieux séculiers en ont longtemps témoigné. Mais il y a belle lurette que nos filles religieuses, de la Charité ou autres congrégations, ont rangé leurs cornettes et robes de bronze au rayon des antiquités, que nos prêtres portent le col roulé plutôt que le col dur romain. S'il est légitime que vos mères, vos femmes, vos soeurs, dont beaucoup voudraient être, ou sont déjà, à la pointe de l'intégration, soient l'objet de notre respect, ne les laissez pas s'enfermer dans une prison de voile, ne les y placez point. 

Ne confondez donc pas "être voilée" et être embusqué. Nous savons que ces voiles n'ont pas de vraie signification religieuse, qu'ils n'étaient qu'une protection de la beauté des femmes contre les sables et les ardeurs du soleil et qu'ils furent instrumentalisés en moyens de soumission par des fondamentalistes obsédés de sexe. De plus, en France et dans l'Europe, cacher son visage est signe de défiance, de duplicité, de refus de communication, de refus de l'autre dans sa dignité. Et c'est interdit pas nos lois relatives à l'espace et au service du public et réprouvé par nos coutumes.  Pratiquez donc votre religion en respectant celles des autres ainsi que les traditions qui sont les leurs, sans imposer de force ou de manière détournée les vôtres.

En un mot "ne réveillez pas le dragon qui dort".

et ainsi que nous l'enseignent les trois voeux maçonniques qui clôturent chacune de nos réunions pour que :

- l'amour soit entre les hommes,

- la paix règne sur terre,

- la joie soit dans les coeurs,

que

- la Sagesse, dont vous détenez vous aussi une part, préside à l'édification du pays commun,

- la Force de vos bras, de votre intelligence, le soutienne,

- la Beauté de vos moeurs et de votre humanité l'orne.

Nous saluons vos pères et vos parents, et les pères et les parents de ceux venus de plus loin, de ce qu'on appelait "les colonies" ou les "territoires", qui ont servi ou qui servent la France avec honneur parce qu'ils se sentent ou se sentaient Français, parce qu'ils veulent ou voulaient, eux aussi, ce bien suprême que le Créateur à donné à tous les hommes contre toutes les soumissions : "la Liberté".

"Liberté qui s'arrête là où commence celle de l'autre" ainsi que les pères des Lumières l'ont enseigné.

Permettez-moi, chers amis Mohamed et Aïcha, venus comme beaucoup d'autres d'Algérie ou d'Afrique du Nord, une note personnelle. Sachez que j'embrasse votre terre d'origine avec affection, que je respecte le sang de vos martyrs mais sans que je sois oublieux de celui de mes camarades tombés, eux aussi, en fidélité à leur devoir.

Emmanuel