29/02/2008
Un Rey-onnant morceau d'antimaçonnisme
Auteur d’un ouvrage sur la franc-maçonnerie, Mgr Dominique Rey, évêque de Fréjus-Toulon, rappelle que pour l’Eglise on ne peut pas être à la fois catholique et membre d’une loge maçonnique.
"Peut-on être chrétien et franc-maçon" est le titre d'un des livres de cet épiscope. Peu importe sa réponse qu'on ne connaît que trop en bon perroquet qu'il est de Ratzinger ancien préfet de l'Inquisition devenu pape.
La nôtre est résolument OUI!
Interview donné par Mgr REY au Novelist *
1/Mgr Dominique Rey, dans le nouveau code de droit canon l'église ne parle plus de la franc-maçonnerie – Le jugement de l’Eglise a-t-il changé à son sujet ? Le 26 novembre 1983, la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, par son préfet qui était alors le card. Josef Ratzinger a fait une mise au point sur la Franc-maçonnerie. Cette déclaration a été approuvée par le pape Jean-Paul II. Elle dit ceci : "On a demandé si le jugement de l’Église sur les associations maçonniques était changé, étant donné que dans le nouveau Code de droit canonique il n’en est pas fait mention expresse, comme dans le Code antérieur. Le jugement de l’Église sur les associations maçonniques demeure donc inchangé […] et l’inscription à ces associations reste interdite par l’Église" voir note sous texte [i].
Notons seulement que pour une partie de l'Eglise (communauté des croyants), distincte de l'église (organisation humaine sise à Rome et pratiquant le grand ECAR), feu JEPETO, comme le nommaient les djeuuuunes cathos, fut un antipape (voire même un pape franc-maçon de la lignée de JXXIII, Paul VI...) qui a, en tant que chef de l'ECAR, une responsabilité historique dans la propagation du sida.
2/ Quels sont les éléments de l’enseignement maçonnique de base que l’Eglise trouve incompatibles avec la foi catholique ? La franc-maçonnerie, qu’elle soit opérative ou spéculative, est de type gnostique (la gnose est une hérésie déjà condamnée par St Irénée au IIème siècle et que l’on retrouve dans tous les ordres initiatiques).
Cette affirmation montre simplement que Mgr REY réduit la Gnose à qq courants pseudos chrétiens nés dans le sein même de l'église des premiers siècles.
Elle prétend donner à ses adeptes une formation ésotérique, enseignement secret qui révèlerait le sens caché de l’univers.
Ignorance ou mensonge? La FM n'a jamais prétendu donner à ses adeptes quelque enseignement ésotérique, secret révélant le sens caché de l'Univers. C'est là une Connaissance qui n'appartient qu'à Dieu lui-même et dont aucun homme, fut-il comme le pape auto-proclamé "infaillible", n'a le premier mot.
Tous les rituels font miroiter aux yeux des initiés l’acquisition d’une « Tradition primordiale »,
Fantasie de la même eau que ce qui précède et suit!
et d’une « Lumière » qui, au mieux, est celle de l’intelligence humaine,
Désolé votre honneur mais ca serait déjà beaucoup si ce n'était que ça.
mais en aucun cas, celle de la Transfiguration en Christ.
Normal la maçonnerie n'est pas une religion et encore moins une religion révélée qui promet sur la base d'affirmations indémontrables un hypothètique salut de l'autre côté de la vie. A la condition bien sûr d'avoir été un objet bien obéissant entre les pattes d'un clergé qui fut inquisiteur, collaborationniste à ses heures et démissionnaire devant l'envahissement sectaire du domaine public.
3/ Comment peut-on concilier cette nécessité d’attester notre foi avec l’interdiction, faite à l’intérieur de la loge, d’aborder les problèmes religieux ?
"Notre foi", étant celle de l'interviewver on est d'ores et dèjà en droit de s'interroger sur l'objectivité et la neutralité professionnel de ce plumitif.
La condamnation de l’Eglise porte sur l’ésotérisme, c’est-à-dire le fait de transmettre la doctrine à un cercle restreint d’initiés.
Encore faudrait-il que cette doctrine existe.
Le goût pour les doctrines secrètes a toujours été perçu comme inconciliable avec l’Evangile.
Et pourtant l'Evangile est bourré de doctrines secrètes exprimées sous formes de paraboles que seule l'ECAR se donne le droit d'interpréter. Et quel écart entre l'idéal et la réalité!
Dans l’Eglise catholique, il n’y a pas d’enseignement secret.
Pas plus qu'il n'y a de pédophiles, de scandales financiers, de dissimulations de criminels de guerre...
La doctrine de la foi chrétienne est accessible à tous. Le christianisme est la Révélation de l’amour de Dieu manifesté en son Fils Jésus-Christ. Il ne voile pas. Au contraire, il dévoile.
C'est faux. La révélation de l'Amour de Dieu se passe très bien des discours emphigouriques de tous les épiscopes mîtrés ou enturbanés. Tous les docteurs de l'église en témoignent. Les Evangiles également. Quant aux bûchers, à la torture inquisitoriale... ils furent d'évidentes preuves d'Amour.
4/Quelles sont les conséquences théologiques de cette incompatibilité ? Elles sont multiples. Par exemple, le christianisme comporte un certain nombre de dogmes qui sont autant de « fenêtres » ouvertes par la lumière de la foi sur le Mystère de Dieu. Ces affirmations dogmatiques objectivent notre foi. Celle-ci peut alors s’exposer de façon structurée et structurante, et ainsi proposer une intelligibilité du « croire ».
Le Christianisme en tant qu'Eglise (communauté des croyants) n'est pas le catholiscisme (organisation humaine née entre trois et cinq siècles après la mort du Christ (qui, c'est à noter au passage, est d'abord une victime des prêtres)). Il suffit de parcourir la grande majorité des sites catholiques (ou se prétendant tels comme Docteur Angélique ou Final-Age...) pour voir qu'en réalité c'est un obscurcissement constant et volontaire de Vérités connues dans le coeur de tous les hommes quelles que soient leurs religions ou opinions. Et là encore l'ECAR par son silence coupable ou ses prises de positions "missionnaires" se fait l'alliée objective de tous ceux qui font appel à la haine de l'autre, au complotisme, au racisme, à l'anti-judaisme qui sont les proches parents de l'anti-maçonnisme.
Ces affirmations constituent le Credo.
Crédo qui a fait l'objet de la part de l'ECAR de manipulations diverses tendant à faire disparaître l'Unité fondamentale de l'Eglise instituée par le Christ et ses Apôtres, son caractère de Sainteté et son Apostolicité. Initialement le Crédo vieux romain était ainsi rédigé : "Je crois en l'Eglise, une, sainte (de part son fondateur), catholique (au sens Universel), apostolique (en raison de sa filiation). Désormais après manipulation de l'ECAR, soit disant seule d'inspiration divine et détenant seule la Vérité (les autres religions et hommes étant étymologiquement imbéciles), il est devenu : Je crois en l'église catholique (comprendre ECAR)).
Le maçon soutient au contraire le primat et l’autonomie de la raison par rapport à toute vérité révélée.
Surtout quand elle (la vérité) fut ou est transmise par une institution dont les membres ne se révèlent malheureusement pas meilleurs, ou sont même pires, que leurs contemporains.
Le concept de « norme » ou, pis encore, de loi morale, devient ainsi de lui-même une valeur négative. Par exemple, la théologie du salut ou de la grâce.
Depuis quand la théologie du salut ou de la grâce est-elle une "valeur"? Et si cet abbé mitré avait un peu lu ne serait-ce que le premier chapître des Constitutions d'Anderson concernant "Dieu et la religion" il aurait vu que la loi morale du maçon lui enjoint d'être "homme d'honneur et de probité...".
Selon la « philosophie humaniste », prônée par la maçonnerie, l’homme n’a pas besoin de salut.
On voit bien ici quel mépris pour la "philosophie humaniste" se cache dans cette citation. Cet évêque se place ici en digne (é)mule des papes de la fin du XIXème et de leurs positions anti-sociales ou de leurs charitables conseils aux petits d'avoir à remercier Dieu de les avoir faits pauvres.
Il se perfectionne sans cesse lui-même.
Et que cela embête notre épiscope de service! Ce qui est sûr c'est que le maçon se passe très bien des sornettes magist(é)rales assénées par les semblables de l'évêque et leur armée de théologiens. Comme s'il y avait sur cette terre un homme capable de dire "Dieu" dans tous ses aspects.
De plus, pour accéder au salut, le chrétien compte d’abord sur la grâce miséricordieuse de Dieu qui éclaire son intelligence, soutient son agir, attise son désir… plus que sur ses propres ressources ou ses seules œuvres ! D’où l’importance de la prière et de la vie sacramentelle. A contrario, le maçon compte essentiellement sur son pouvoir « auto-créateur » et sur la force de solidarité de sa loge !
Si Dieu est ce qu'en dit Dominique Rey alors nul doute qu'il inspire aussi l'action et la réflexion du maçon. Comme disait l'Abbé Pierre, dont certains catholiques ont dit pis que pendre, "Le ciel oui mais pas sans les hommes".
5) Qu’en est-il sur le plan moral ?Sur le plan éthique, les différences sont également substantielles. Pour le franc-maçon, les règles morales sont appelées à évoluer sans cesse sous la pression de l’opinion publique et des progrès de la science. Aucune règle n’est intangible. La morale doit évoluer au gré du consensus des sociétés. Elle devient contingente.
Et on a vu au cours des siècles comment des papes, des évêques des clercs de toutes sortes et bien sûr des laïcs se sont arrangés pratiquement de la morale. "Faites ce que je dis.... mais pas ce que je fais". On a vu par exemple comment cette morale a conduit à l'avortement, dans des arrières cuisines de faiseuses d'anges, sous le regard d'un crucifix navré, des millions de pauvres filles séduites par de bons apôtres bénis par une église toujours placée du côté des puissants.
On ne peut nier que l’homme se situe toujours dans une culture particulière (invention de de l'eau chaude!), mais on ne peut nier non plus que l’homme ne se définit pas tout entier par cette culture (faut être évêque pour savoir ça?). Du reste, le progrès même des cultures montre qu’il existe en l’homme quelque chose qui transcende les cultures (quelle intelligence confondante!). Ce « quelque chose » est précisément la nature de l’homme : cette nature est la mesure de la culture et la condition pour que l’homme ne soit prisonnier d’aucune de ses cultures, mais pour qu’il affirme sa dignité personnelle dans une vie conforme à la vérité profonde de son être (à se demander de quel excellent pipoteur notre évêque sort ce remarquable enfilage de perles?).
L’Internationales Freimaurer Lexikon (dictionnaire international franc-maçon), source reconnue comme objective, met en cause ce qui pour elle relève du dogmatisme de l’Eglise catholique : « Toutes les institutions qui reposent sur un fondement dogmatique, et dont l’Eglise catholique peut être considérée comme la plus représentative, exercent une contrainte de la foi » (Lennhoff-Posner, Vienne, 1975, p 374).
Rien n'est plus juste en effet... sinon à quoi aurait servi l'Inquisition?
Ce n’est pas sans raison que, à l’intérieur de la loge, toute discussion sur les phénomènes religieux est sévèrement interdite.
Non! Et voilà bien une démonstration d'ignorance voire de faux témoignage volontaire. La FM n'interdit pas les discussions sur le fait religieux. Elle interdit l'adoption par vote de motions, libels... prenant parti pour ou contre la religion, la foi... Et ce afin justement de ne pas contraindre l'opinion de ses membres. En bon français on appelle ça "respect de l'autre". En cette matière l'ECAR, qui méprise, écrase, anathémise, excommunie... qui ne pense comme elle n'a pas de leçon à donner à la FM. Ni la FM a en recevoir d'elle.
D’autre part, la franc-maçonnerie prône le naturalisme, sans que ce dernier repose absolument sur un principe de transcendance. « En toute chose, c’est la raison humaine et la nature humaine qui restent maîtresses et souveraines. »
Erreur! Le Principe Créateur sous le nom de GADL'U... est un (le) Principe trancendant de la maçonnerie. Il a donné à l'homme le bien le plus précieux : la Liberté... qu'aucun pouvoir n'a le droit d'amortir ou d'éteindre... d'où proviennent les sentiments d'honneur... (Convent de Lausanne 1875). C'est à partir de là que la FM ajoute ... "à ceux pour qui la religion est un secours : pratiquez la religion de votre coeur sans crainte. En tout ne suivez que votre conscience."
La franc-maçonnerie refuse tout phénomène surnaturel (apparitions, miracles, théophanie…) considéré comme une intervention divine.
Nous serions même étonnés que la FM en parle... ou alors au rang des pensées et pratiques magiques +- positives qui, si elles ne font pas de bien ne peuvent faire de mal, sauf sur quelques esprits en quête de merveilleux et/ou d'une assurance pour le futur.
6/Pourtant les franc-maçons n’attaquent pas le principe des religions et prônent un humanisme fait de tolérance, valeurs aujourd’hui considérées comme universelles. La franc-maçonnerie est une philosophie humaniste consacrée à la recherche de la vérité, mais elle estime celle-ci inaccessible.
Si cet évêque avait fait un peu de mathématiques élémentaires il saurait que même une progression géométrique ne permet pas, quand bien même elle peut s'en approcher, d'atteindre l'absolu. Il saurait aussi que le Créateur est l'auteur de nombres comme "PI". Il y a donc bien dans ce monde une vérité in-accessible. Et s'il n'était pas imbu de sa soi disant "inspiration divine" il saurait qu'il n'y a sur cette terre aucun homme qui connaisse "La Vérité". Et ce même en Eglise puisqu'en gros au sein du milliard et demi de chrétiens on se se dispute ferme sur la lecture des enseignements du Maître.
Elle rejette tout dogme. Elle conduit au relativisme,
L'ECAR elle-même est relativiste puisqu'au nom de l'oecuménisme elle accepte de se réunir en prière avec des gens qui ne pensent pas Dieu comme elle (voire même qui ne rêvent que de lui tailler un costard). C'est donc qu'elle considère la prière d'autres croyants comme aussi efficiente que la sienne. Et ça se nomme "relativisme".
au prétexte de la tolérance absolue, au « constructivisme », au nom de la capacité de l’homme à « s’auto-créer ».
Monsignore qui n'est pas à une imprécision près fait à nouveau preuve de son ignorance de la maçonnerie. Si elle peut en effet vouloir aider à construitre l'homme et l'humanité, ce qui correspond à la vocation de "bâtisseur", elle ne prétend nullement "l'auto-créer". Tout au plus lui propose-t-elle une voie de perfectionnement. C'est même le sens spécifique des loges maçonniques qualifiées de "perfection".
En raison de son relativisme religieux, les religions se retrouvent sur le même plan, comme autant de tentatives concurrentes pour exprimer la vérité sur Dieu qui, en soi, est inatteignable et insaisissable.
Non! c'est l'ECAR qui joue la concurrence et quand elle le peut pour l'écraser ainsi qu'elle l'a fait avec la gnose, qualifiée d'hérésie, avec les conversions forcées en Afrique et en Amérindie contre les cultures et cultes premiers, avec les Cathares, les Albigeois et bien d'autres encore. Qu'elle a essayé de le faire contre la FM, sans succès.
Les diverses communautés religieuses auxquelles appartiennent les membres des loges, sont de fait considérées secondaires par rapport à l’appartenance plus englobante et supra confessionnelle à la fraternité maçonnique. L’engagement, au sein de cette fraternité, transforme la structure de l’acte de foi chrétien. Celui-ci n’est plus perçu comme une adhésion globale qui engage toute la personne pour le Christ, en suivant son enseignement. « Car en Lui, dans Son propre Corps, habite la plénitude de la divinité. En Lui, vous avez tout reçu en plénitude, car Il domine toutes les puissances de l’univers. » (Col 2, 9-10)
Rappelons encore une fois ce que dit la FM à ses membres "A ceux pour qui la religion est un secours : pratiquez votre religion sans crainte. En tout ne suivez que votre conscience". On ne peut être plus clair et aux antipodes du mensonge écclésiastique de l'abbé Rey.
7/ Avez-vous rencontré des franc-maçons de haut rang, en activité ou « repentis » qui vous ont parlé à cœur ouvert ? Vous ont-ils dit des choses qui vous ont frappé ? J’ai eu l’occasion de côtoyer quelques francs-maçons. J’ai retenu deux choses de ces contacts : L’idéologie de la franc-maçonnerie est difficile à cerner, d’une part parce qu’elle cultive le secret, et d’autre part, en raison de son éclatement en divers courants.
Autant dire que l'épiscope est dans l'ignorance de ce qu'elle est réellement. Et dire que ça dure depuis au moins Clément XII dont la bulle "In Eminenti" est fondée sur la renommée publique ( comprendre rumeur) et l'insinuation d'hommes pieux (comprendre calomnie).
Elle se fixe comme but de « travailler à l’amélioration matérielle et morale, ainsi qu’au perfectionnement intellectuel et moral de l’humanité. »
Et ce n'est pas le moindre de ses sujets de fièreté. "Le Ciel oui mais pas sans les hommes".
J’ai eu l’occasion de rencontrer des francs maçons qui se déclarent chrétiens.
Et nous en sommes!
En effet, la franc-maçonnerie anglo-saxonne confesse sa foi en Dieu, « Grand Architecte de l’univers ».
Il y a en France une maçonnerie non anglo-saxonne, non inféodée, qui laisse ses membres libres de définir le GADL'U selon leur coeur.
Cependant, les constitutions d’Anderson de 1723, texte de référence pour tous les francs-maçons, ne comportent pas la moindre référence à Dieu en Jésus-Christ, ne mentionnent jamais la Sainte Trinité, le péché, le salut, la résurrection, la venue de l’Esprit-Saint… Ils ne voient pas l’incohérence de la double appartenance.
Comment pourrait-il y avoir incohérence puisque la maçonnerie n'est pas une religion? Donc dire que la maçonnerie ne mentionne ni... ni... qui relève du religieux est tout simplement stupide.
Le déficit de transmission de la Vérité, l’absence de chaleur humaine et la tendance à la désacralisation de la vie ecclésiale, qui affectent parfois les communautés chrétiennes, pourraient expliquer en partie l’attrait exercé par la franc-maçonnerie. La culture relativiste et de « tolérance », le souci humaniste de bienfaisance, le refus de toute forme d’obscurantisme et de toute forme d’intégrisme…consonnent avec les attentes de nos contemporains, et les discours actuellement véhiculés par les politiques et les médias. La proposition est attractive et séduisante.
Elle signe surtout l'échec de 2 000 ans d'évangélisation.
Enfin, le divorce entre la foi et la raison, dénoncé par le pape Jean-Paul II dans sa lettre encyclique Fides et Ratio (n° 4, déporte insidieusement la foi vers un certain piétisme, un sentimentalisme religieux. Livrée à elle-même, la raison n’est plus finalisée par la recherche de la Vérité. Elle se trouve à la merci des idéologies ou des constructions subjectives. L’engagement du chrétien dans la franc-maçonnerie relève, dans bien des cas, d’une méconnaissance de ce lien organique entre foi et raison.
On voit bien en tous cas ce que provoque ce lien et ces discours auprès de ces milliers de croyants qui s'en détournent chaque jour.
8/La franc-maçonnerie est-elle vraiment une société secrète dans ses structures et ses enseignements ? Il suffit de demander à un ami franc-maçon de vous faire connaître la liste de ceux qui fréquentent sa loge ou d’avoir accès au rituel d’initiation pour se rendre compte qu’il y a une culture du secret.
Pour ce qui est des rituels... voir toutes les bonnes librairies (+ de 80 000 ouvrages selon le Vatican). Et nous serions bien étonnés que l'église n'en ait pas depuis fort longtemps dans ses archives. Mais entre lire et vivre... Quant à faire état d'appartenance il suffit de se rappeler Vichy et ses lois anti-maçonniques largement approuvées par une église collaborationniste ou récemment en Pologne les chasses aux FM organisées dans les paroisses.
9/La franc-maçonnerie a-t-elle un réel poids sur la société à travers des réseaux ou est-elle une sorte de relique de la gnose antique un brin désuète dans ses rites? En avez-vous des exemples ? Son influence sur les idées politiques a été déterminante dans l’histoire de la République française. Je pense bien sûr à la IIIème République. Son rôle fut indéniable dans l’émergence des libertés publiques.
Enfin un compliment. Noter que ces libertés publiques - laïcité notamment - profitent à l'église plus qu'à d'autres.
Mais dans un contexte très polémique, ses mots d’ordre anti-cléricaux et laïcistes dirigés contre l’Eglise, s’insurgeaient contre l’autorité morale et doctrinale qu’elle représentait.
Voulez-vous que nous vous retournions la chose. L'anti-cléricalisme ne fut (n'est) que le résultat de ces impositions doctrinales poussées jusqu'à la haine. Voyez les encycliques des papes de la fin du XIXème siècle. Voyez les revues, prônes... haineux d'un évêque Jouin... C'est pour n'avoir pas tenu compte de l'avertissement d'un Saint Benoît d'avoir à "conduire le troupeau sans l'éreinter" que cette contre réaction s'est faite si incisive. Et c'est pour la même raison qu'aujourd'hui, même si la patte est devenue de velours, des milliers de fidèles se détournent d'une église engluée dans ses dogmes et incapables de répondre aux besoins du temps.
Par l’entremise de cercles de pensées et de réseaux d’influence, certains projets de loi votés par le Parlement, ont été préparés dans le silence des couvents Convents maçonniques (en particulier les frères furent actifs sur la question scolaire).
Les "couvents" nous les laissons à ce fin connaisseur qui écrivit "La religieuse". Et oui! Il fallait soustraire les enfants à l'obscurantisme et leur permettre d'accèder librement à tous les savoirs.
Cependant, la franc-maçonnerie offre aujourd’hui une image extrêmement diversifiée où s’affrontent et se confrontent divers courants de pensée et diverses traditions.
Et c'est cette diversité qui fonde la richesse maçonnique. Reste à savoir si du dogmatisme rigide ne nait pas l'ennui?
Malgré une volonté affichée de donner une image positive de transparence, une certaine opacité entretenue interdit de disposer de données objectives sur l’impact réel de la franc-maçonnerie sur la société française.
Ni plus ni moins que n'importe quel autre groupe. Connait-on exactement l'impact des réseaux catholiques sur la société civile. Ce qu'on sait c'est qu'ils sont nombreux à s'agiter dans l'ombre contre tout ce qui est progrès social. Il est vrai qu'avec un JPII condamnant la théologie de la libération... il y a un exemple à suivre (sic)
Par exemple, on trouve une grande différence d’une obédience à l’autre quant au rapport au religieux : depuis l’athéisme déclaré jusqu’à des loges dites de « franc-maçonnerie chrétienne ». La franc-maçonnerie constitue un réseau d’influence et de pouvoir dans plusieurs secteurs de la société. On dénonce quelquefois ses intrigues, les tractations affairistes de certaines « Fraternelles » (celles-ci regroupent par profession des initiés de toutes obédiences).
Toute société a ses moutons noirs. Et certains scandales récents au sein de l'église nous dispensent d'en dire plus. Combien de patrons bons catholiques devant les tribunaux pour infractions aux règles de la comptabilité, de la gestion, des droits des travailleurs, de la sécurité??? Pourquoi leur qualité de catho n'est-elle jamais mise en avant alors que celle des FM l'est toujours?
Mais il ne faut ni exagérer l’influence de la franc-maçonnerie, ni sous-estimer son emprise, ni diaboliser ses membres.
Comment disait déjà l'abbé Barruel? : "Ecrasez l'immonde (la FM) mais priez pour la conversion de ses membres". Rien de nouveau donc sous le soleil.
En conclusion voilà encore un membre de l'église catholique supposée porter une religion d'amour qui se laisse aller à nouveau aux vieux démons de l'anti-maçonnisme au moyen de thèses mille fois reprises depuis Clément XII.
Site Novelist
http://religions.blog.lenouvelliste.ch/2008/02/23/l%E2%80...
12:00 Publié dans C2- Antimaçonnisme religieux (Catholique) | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : église, catholique, église catholique, francs-maçons, franc-maconnerie, antimaçonnisme, évêques
15/05/2007
Une autre forme d'antimaçonnisme : Le Communisme
Le site "Frédéric Desmons", (réservé aux seuls maçon(ne)s dûment reconnu(e)s) http://www.fd-1877.net/ nous a autorisé à mettre en ligne sur notre blog quelques uns des textes, originaux ou non, qu'il a porté à la connaissance de ses membres. Nous en remercions l'auteur ainsi que le webmestre du site. Emmanuel (L....ys).
Nous verrons dans ces articles comment le communisme, en tant qu'idéologie, qui fut certes à l'origine de certaines avancées sociales et politiques pour les pays de l'Est, mais qui fut un pourvoyeur bien plus grand encore de crimes contre l'humanité, se montre ennemi déclaré des Droits de l'Homme et de toutes formes de la pensée libre. Nous verrons comment les régimes qui en découlèrent, et qui furent pour beaucoup, partenaires de l'alliance contre nature avec l'excécrable régime nazi, furent invités à se montrer aussi "inquisitoriaux" que le fut en son temps l'église catholique afin, selon le mot de Trostsky "de brûler au fer rouge la FM cette plaie mauvaise sur le corps du communisme".
Dieu merci, si nous pouvons dire, de nombreux communistes refusèrent cela et firent honneur, souvent au prix de leur vie, à l'ideal d'humanisme et de fraternité qui était au coeur de l'idée communiste.
La franc-maçonnerie, la Ligue des Droits de l'Homme et la presse bourgeoise
Dernier congrès de l'Internationale Communiste en 1922 avant sa stalinisation. Lénine, malade, n'y assistera qu'en partie.
L'incompatibilité de la franc-maçonnerie et du socialisme était considérée comme évidente dans la plupart des partis de la II° Internationale. Le Parti Socialiste italien a exclu les Francs-Maçons en 1914, et cette mesure a été, sans aucun doute, une des raisons qui ont permis à ce parti de suivre, pendant la guerre, une politique d'opposition, puisque les Francs-Maçons, en qualité d'instruments de l'Entente, agissaient en faveur de l'intervention.
Si le deuxième Congrès de l'Internationale Communiste n'a pas formulé, dans les conditions d'adhésion à l'Internationale, de point spécial sur l'incompatibilité du communisme et de la franc-maçonnerie, c'est parce que ce principe a trouvé sa place dans une résolution séparée votée à l'unanimité du Congrès.
Le fait, qui s'est révélé d'une façon inattendue au 4° Congrès de l'Internationale Communiste, de l'appartenance d'un nombre considérable de communistes français aux loges maçonniques est, aux yeux de l'Internationale Communiste, le témoignage le plus manifeste et en même temps le plus pitoyable que notre Parti français a conservé, non seulement l'héritage psychologique de l'époque du réformisme, du parlementarisme et du patriotisme, mais aussi des liaisons tout à fait concrètes, extrêmement compromettantes pour la tête du Parti, avec les institutions secrètes, politiques et carriéristes de la bourgeoisie radicale.
Tandis que l'avant-garde communiste du prolétariat recueille toutes ses forces pour une lutte sans merci contre tous les groupements et organisations de la société bourgeoise au nom de la dictature prolétarienne, de nombreux militants responsables du Parti, députés, journalistes, et jusqu'à des membres du Comité Directeur, conservent une liaison étroite avec les organisations secrètes de l'ennemi.
Un fait particulièrement déplorable est celui que tout le Parti, dans toutes ses tendances, n'a pas soulevé cette question après Tours, malgré sa clarté évidente pour toute l'Internationale et qu'il ait fallu la lutte des fractions à l'intérieur du Parti pour la faire surgir devant l'Internationale dans toute son importance menaçante.
L'Internationale considère comme indispensable de mettre fin, une fois pour toutes, à ces liaisons compromettantes et démoralisatrices de la tête du Parti Communiste avec les organisations politiques de la bourgeoisie. L'honneur du prolétariat de France exige qu'il épure toutes ses organisations de classe des éléments qui veulent appartenir à la fois aux deux camps en lutte.
Le Congrès charge le Comité Directeur du Parti Communiste français de liquider avant le 1° janvier 1923 toutes les liaisons du Parti, en la personne de certains de ses membres et de ses groupes, avec la franc-maçonnerie. Celui qui, avant le 1° janvier, n'aura pas déclaré ouvertement à son organisation et rendu publique par la presse du Parti sa rupture complète avec la franc-maçonnerie est, par là même, automatiquement exclu du Parti Communiste sans droit d'y jamais adhérer à nouveau, à quelque moment que ce soit. La dissimulation par quiconque de son appartenance à la franc-maçonnerie sera considérée comme pénétration dans le Parti d'un agent de l'ennemi et flétrira l'individu en cause d'une tâche d'ignominie devant tout le prolétariat.
Considérant que le seul fait d'appartenir à la franc-maçonnerie, qu'on ait poursuivi ou non, ce faisant, un but matériel, carriériste ou tout autre but flétrissant, témoigne d'un développement extrêmement insuffisant de la conscience communiste et de la dignité de classe, le 4° Congrès reconnaît indispensable que les camarades qui ont appartenu jusqu'à présent à la franc-maçonnerie et qui rompront maintenait avec elle soient privés durant deux ans du droit d'occuper des postes importants dans le Parti. Ce n'est que par un travail intense pour la cause de la révolution en qualité de simples militants, que ces camarades peuvent reconquérir la confiance complète et le droit d'occuper dans le Parti des postes importants.
Considérant que la Ligue pour la défense des Droits de l'Homme et du Citoyen est, dans son essence, une organisation du radicalisme bourgeois, qu'elle utilise ses actes isolés contre telle ou telle injustice pour semer les illusions et les préjugés de la démocratie bourgeoise et surtout que, dans les cas les plus décisifs et les plus graves, comme par exemple pendant la guerre, elle prête tout son appui au capital organisé sous forme d'Etat, le 4° Congrès de l'Internationale Communiste estime absolument incompatible avec le titre de communiste et contraire aux conceptions élémentaires du communisme le fait d'appartenir à la Ligue des Droits de l'Homme et du Citoyen et invite tous les membres du Parti adhérant à cette Ligue à en sortir avant le 1° janvier 1923, en le portant à la connaissance de leur organisation et en le publiant dans la Presse.
Le Congrès invite le Comité Directeur du Parti Communiste français :
1° A publier immédiatement son appel à tout le Parti, éclaircissant le sens et la portée de la présente résolution.
2° A prendre toutes les mesures découlant de la résolution pour que l'épuration du Parti de la franc-maçonnerie et la rupture de toute relation avec la Ligue des Droits de l'Homme et du Citoyen soit effectuée sans faiblesse et sans omission avant le 1° janvier 1923. Le Congrès exprime son assurance que, dans son travail d'épuration et d'assainissement, le Comité Directeur sera soutenu par l'immense majorité des membres du Parti, à quelque fraction qu'ils appartiennent.
Le Comité Directeur doit dresser les listes de tous les camarades qui, à Paris et en province, tout en faisant partie du Parti Communiste et en assumant des postes divers, même de confiance, collaborent en même temps à la presse bourgeoise et inviter ces éléments à faire, avant le 1° janvier 1923, un choix complet et définitif entre les organes bourgeois de corruption des masses populaires et le Parti révolutionnaire de la dictature du prolétariat.
Les fonctionnaires du Parti qui ont violé la prescription établie et réitérée maintes fois dans des décisions visant le Parti français doivent être privés du droit d'occuper des postes de confiance pendant un an.
Communisme et franc-maçonnerie
Les cahiers communistes
22 avril 1922. Un commentaire de Léon Trotsky
Le développement du capitalisme a toujours approfondi et approfondit sans cesse les antagonismes sociaux. Les efforts de la bourgeoisie ont toujours tendu à émousser ces antagonismes en politique. L'histoire du siècle dernier nous présente une extrême diversité de moyens employés par la bourgeoisie à cet effet. La répression pure et simple est son argument ultime, elle n'entre en scène que dans les moments critiques. En temps «normal», l'art politique bourgeois consiste à enlever pour ainsi dire de l'ordre du jour la question même de la dénomination bourgeoise, à la masquer de toutes sortes de décors politiques, juridiques, moraux, religieux, esthétiques et à créer de cette façon dans la société l'impression de la solidité inébranlable du régime existant.
Il est ridicule et naïf, pour ne pas dire un peu sot, de penser que la politique bourgeoise se fasse tout entière dans les parlements et dans les articles de tête. Non, cette politique se fait au théâtre, à l'église, dans les poèmes lyriques et à l'Académie, et à l'école. La bourgeoisie enveloppe de tous côtés la conscience des couches intermédiaires et même de catégories importantes de la classe ouvrière, empoisonnant la pensée, paralysant la volonté.
C'est la bourgeoisie russe, primitive et mal douée, qui a le moins réussi dans ce domaine, et elle a été cruellement punie. La poigne tsariste mise à nu, en dehors de tout système compliqué de camouflage, de mensonge, de duperie, et d'illusions, se trouva insuffisante. La classe ouvrière russe s'empara du pouvoir.
La bourgeoisie allemande, qui a donné incomparablement plus dans les sciences et les arts, était politiquement d'un degré à peine supérieure à la bourgeoisie russe : la principale ressource politique du capital allemand était le Hohenzollern prussien et le lieutenant prussien. Et nous voyons actuellement la bourgeoisie allemande occuper une des premières places dans la course à l'abîme.
Si vous voulez étudier la façon, les méthodes et les moyens par lesquels la bourgeoisie a grugé le peuple au cours des siècles, vous n'avez qu'à prendre en mains l'histoire des plus anciens pays capitalistes : l'Angleterre et la France. Dans ces deux pays, les classes dirigeantes ont affermi peu à peu leur domination en accumulant sur la route de la classe ouvrière des obstacles d'autant plus puissants qu'ils étaient moins visibles.
Le trône de la bourgeoisie anglaise aurait été brisé en mille morceaux s'il n'eût été entouré d'une atmosphère de respectability, de tartufferie et d'esprit sportif. Le bâton blanc des policemen ne protège que la ligne de repli de la domination bourgeoise et une fois le combat engagé sur cette ligne — la bourgeoisie est perdue. Infiniment plus important pour la conservation du régime britannique est l'imperceptible toile d'araignée de respectability et de lâcheté devant les commandements bourgeois et les «convenances» bourgeoises qui enveloppe les cerveaux des tradeunionistes, des chefs du Labour Party et de nombreux éléments de la classe ouvrière elle-même.
La bourgeoisie française vit, politiquement, des intérêts du capital hérité de la Grande Révolution. Le mensonge et la perversion de la démocratie parlementaire sont suffisamment connus et semble-t-il, ne laissent plus place à aucune illusion. Mais la bourgeoisie fait de cette perversion même du régime son soutien. Comment cela ? Par l'entremise de ses socialistes. Ces derniers, par leur critique et leur opposition, prélèvent sur les masses du peuple l'impôt de la confiance, et au moment critique transmettent toutes les voix qu'ils ont recueillies à l'Etat capitalistes. Aussi la critique socialistes est-elle actuellement un des principaux étais de la domination bourgeoise. De même que la bourgeoisie française fait servir à ses but non seulement l'Eglise catholique, mais aussi le dénigrement du catholicisme, elle se fait servir non seulement par la majorité parlementaire, mais aussi par les accusateurs socialistes, ou même souvent anarchistes, de cette majorité. Le meilleur exemple en est fourni par la dernière guerre, où l'on vit abbés et francs-maçons, royalistes et anarcho-syndicalistes, se faire les tambours enthousiastes du capital sanglant.
Nous avons prononcé le mot : franc-maçonnerie. La franc-maçonnerie joue dans la vie politique française un rôle qui n'est pas mince. Elle n'est en somme qu'une contrefaçon petite bourgeoise du catholicisme féodal par ses racines historiques. La République bourgeoise de France avançant tantôt son aile gauche, tantôt son aile droite, tantôt les deux à la fois, emploie dans un seul et même but soit le catholicisme authentique, ecclésiastique, déclaré, soit sa contrefaçon petite-bourgeoise, la franc-maçonnerie, où le rôle des cardinaux et des abbés est joué par des avocats, par des tripoteurs parlementaires, par des journalistes véreux, par des financiers juifs déjà bedonnants ou en passe de le devenir. La franc-maçonnerie, ayant baptisé le vin fort du catholicisme, et réduit, par économie petite-bourgeoise, la hiérarchie céleste au seul «Grand Architecte de l'Univers», a adapté en même temps à ses besoins quotidiens la terminologie démocratique : Fraternité, Humanité, Vérité, Equité, vertu. La franc-maçonnerie est une partie non officielle, mais extrêmement importante, du régime bourgeois. Extérieurement, elle est apolitique, comme l'Eglise ; au fond, elle est contre-révolutionnaire comme elle. A l'exaspération des antagonismes de classes, elle oppose des formules mystiques sentimentales et morales, et les accompagne, comme l'Eglise, d'un rituel de Mi-Carême. Contrepoison impuissant, de par ses sources petites-bourgeoises contre la lutte de classe qui divise les hommes, la maçonnerie, comme tous les mouvements et organisations du même genre, devient elle-même un instrument incomparable de lutte de classe, entre les mains de la classe dominante contre les opprimés.
Le grand art de la bourgeoisie anglaise a toujours consisté à entourer d'attention les chefs surgissant de la classe ouvrière, à flatter leur respectability, à les séduire politiquement et moralement, à les émasculer. Le premier artifice de cet apprivoisement et de cette corruption, ce sont les multiples sectes et communautés religieuses où se rencontrent sur un terrain «neutre» les représentants des divers partis. Ce n'est pas pour rien que Lloyd George a appelé l'Eglise «la Centrale électrique de la politique». En France, ce rôle, en partie du moins, est joué par les loges maçonniques. Pour les socialistes, et plus tard pour le syndicaliste français, entrer dans une loge signifiait communier avec les hautes sphères de la politique. Là, à la loge, se lient et se délient les relations de carrière ; des groupements et des clientèles se forment, et toute cette cuisine est voilée d'un crêpe de morale, de rites et de mystique. La franc-maçonnerie ne change rien de cette tactique, qui a fait ses preuves, à l'égard du Parti Communiste : elle n'exclut pas les communistes de ses loges, au contraire, elle leur en ouvre les portes toutes grandes. La maçonnerie cesserait d'être elle-même, si elle agissait autrement. Sa fonction politique consiste à absorber les représentants de la classe ouvrière pour contribuer à ramollir leurs volontés et, si possible, leurs cerveaux. Les «frères» avocats et préfets sont naturellement très curieux et même enclins à entendre une conférence sur le communisme. Mais est-ce que le frère de gauche, qui est le frère cadet, peut se permettre d'offrir au frère aîné, qui est le frère de droite, un communisme sous le grossier aspect d'un bolchévik le couteau entre les dents ? Oh ! non. Le communisme qui est servi dans les loges maçonniques doit être une doctrine très élevée d'un pacifisme recherché, humanitaire, reliée par un très subtil cordon ombilical de philosophie à la fraternité maçonnique. La maçonnerie n'est qu'une des formes de la servilité politique de la petite-bourgeoisie devant la grande. Le fait que des «communistes» participent à la maçonnerie indique la servilité morale de certains pseudo-révolutionnaires devant la petite bourgeoisie et, par son intermédiaire, devant la grande.
Inutile de dire que la Ligue pour la Défense des Droits de l'homme et du citoyen n'est qu'un des accès de l'édifice universel de la démocratie capitaliste. Les loges étouffent et souillent les âmes au nom de la Fraternité ; la Ligue pose toutes les questions sur le terrain du Droit. Toute la politique de la Ligue, comme l'a démontré avec clarté la guerre, s'exerce dans les limites indiquées par l'intérêt patriotique et national des capitalistes français. Dans ce cadre, la Ligue a tout loisir de faire du bruit autour de telle ou telle injustice, de telle ou telle violation du droit ; cela attire les carriéristes et abasourdit les simples d'esprit.
La Ligue des Droits de l'Homme a toujours été, de même que les loges maçonniques, une arène pour la coalition politique des socialistes avec les radicaux bourgeois. Dans cette coalition, les socialistes agissent, bien entendu, non pas comme représentants de la classe ouvrière, mais individuellement. Toutefois, l'importance prise par tel ou tel socialiste dans les loges est déterminée non pas le poids de sa vertu individuelle, mais par l'influence politique qu'il a dans la classe ouvrière. Autrement dit : dans les loges et autres institutions du même genre, MM. les socialistes tirent profit pour eux-mêmes du rôle qu'ils jouent dans le mouvement ouvrier. Et ni vu ni connu, car toutes les machinations sont couvertes par le rituel idéaliste.
Bassesse, quémandage, écorniflage, aventurismes, carriérismes, parasitisme, au sens le plus direct et le plus matériel du mot, ou bien, en un sens plus occulte et «spirituel» — voilà ce que signifie la franc-maçonnerie pour ceux qui viennent à elle d'en bas. Si les amis de Léon Blum et de Jouhaux s'embrassent dans les loges avec leurs frères du bloc des gauches, ils restent, ce faisant, complètement dans le cadre de leur rôle politique ; ils parachèvent dans les séances secrètes des loges maçonniques ce qu'il serait incongru de faire ouvertement en séance publique du Parlement ou dans la presse. Mais nous ne pouvons que rougir de honte en apprenant que dans les rangs d'un Parti communiste (!!!) il y a des gens qui complètent l'idée de la dictature du prolétariat par la fraternisation dans les tenues maçonniques avec les dissidents, les radicaux, les avocats et les banquiers. Si nous ne savions rien d'autre sur la situation de notre Parti français, cela nous suffirait pour dire avec Hamlet : «Il y a quelque chose de pourri dans le royaume de Danemark...» L'Internationale peut-elle permettre à cet état de choses véritablement honteux de se prolonger et même de se développer ? Ce serait permettre que la Parti communiste français occupe dans les système du conservatisme démocratique la place de soutien de gauche occupée autrefois par le Parti socialiste. Mais cela ne sera pas — nous avons trop foi en l'instinct révolutionnaire et en la pensée révolutionnaire de l'avant-garde prolétarienne française. D'une lame impitoyable elle tranchera une fois pour toutes les liens politiques, philosophiques, moraux et mystiques qui rattachent encore la tête de son Parti aux organes déclarés ou masqués de la démocratie bourgeoise, à ses loges, à ses ligues, à sa presse. Si ce coup d'épée laisse par delà les murs de notre Parti quelques centaines et même quelques milliers de cadavres politiques, tant pis pour eux. Tant pis pour eux et tant mieux pour le Parti du prolétariat, car ses forces et son poids ne dépendent pas du seul nombre de ses membres.
Une organisation de 50.000 membres, mais construite comme il faut, qui sait fermement ce qu'elle veut et qui suit la voie révolutionnaire sans jamais s'en écarter, peut et doit conquérir la confiance de la majorité de la classe ouvrière et occuper dans la révolution la place directrice. Une organisation de 100.000 membres contenant centristes, pacifistes, franc-maçons, journalistes bourgeois, etc., est condamnée à piétiner sur place, sans programme, sans idée, sans volonté — et jamais ne pourra conquérir la confiance de la classe ouvrière.
La franc-maçonnerie est une plaie mauvaise sur le corps du communisme français. Il faut la brûler au fer rouge.
Léon Trotsky
Le marxisme contre la franc-maçonnerie
Publié dans la Revue Internationale
Organe du Courant Communiste International (CCI)
Octobre 2005
C'est suite à l'exclusion d'un de ses militants ([1]) que le CCI a été amené à approfondir ce quel furent les positions des révolutionnaires face à l'infiltration de la franc-maçonnerie au sein du mouvement ouvrier. En effet, pour justifier la fondation d’un réseau d' « initiés » au sein de l’organisation, cet ex-militant distillait l'idée selon laquelle sa passion pour les idéologies ésotériques et les « connaissances secrètes » permettait une meilleure compréhension de l'histoire, allant « au-delà » du marxisme. Il affirmait également que de grands révolutionnaires comme Marx et Rosa Luxemburg connaissaient l'idéologie franc-maçonne, ce qui est vrai, mais il laissait entendre qu’eux-mêmes étaient peut-être aussi franc-maçons. Face à ce type de falsifications éhontées visant à dénaturer le marxisme, il est nécessaire de rappeler le combat sans merci mené depuis plus d'un siècle par les révolutionnaires contre la franc-maçonnerie et les sociétés secrètes qu'ils considéraient comme des instruments au service de la classe bourgeoise. C'est l'objet de cet article.
A l’opposé de l’indifférentisme politique anarchiste, les marxistes ont toujours défendu que le prolétariat, pour pouvoir accomplir sa mission historique, devait comprendre tous les aspects essentiels du fonctionnement de son ennemi de classe. Comme classe exploiteuse, ces ennemis du prolétariat enploient nécessairement le secret et la tromperie dans leurs luttes entre eux et contre la classe ouvrière. C’est pourquoi Marx et Engels, dans toute une série d’écrits importants, ont dénoncé face à la classe ouvrière les structures et activités secrètes de la classe dominante.
Ainsi, dans ses « Révélations de l’histoire diplomatique du 18e siècle », basées sur une étude exhaustive des manuscrits diplomatiques du British Museum, Marx dénonça la collaboration secrète des ministères britannique et russe depuis l’époque de Pierre le Grand. Dans ses écrits contre Lord Palmerston, Marx révéla que la poursuite de cette alliance secrète était essentiellement dirigée contre les mouvements révolutionnaires à travers l’Europe. En fait, au cours des deux premiers tiers du 19e siècle, la diplomatie russe, bastion de la contre-révolution à l’époque, était impliquée dans « tous les soulèvements et conspirations » du moment, y compris les sociétés secrètes insurrectionnelles telles que les Carbonari, essayant de les manipuler à ses propres fins. ([2])
Dans sa brochure contre « Monsieur Vogt » Marx mit en lumière comment Bismarck, Palmerston et le Tsar soutenaient les agents du Bonapartisme sous Napoléon III en France en infiltrant et dénigrant le mouvement ouvrier. Les moments marquants du combat du mouvement ouvrier contre ces manoeuvres cachées furent la lutte des marxistes contre Bakounine dans la 1re Internationale et des « Eisenachiens » contre l’utilisation des « Lassaliens » par Bismarck en Allemagne.
En combattant la bourgeoisie avec sa fascination du caché et du mystère, Marx et Engels montrèrent que le prolétariat est l’ennemi de toute politique de secret et de mystification quelle qu’elle soit. A l’opposé du travailliste britannique Urquhart – dont la lutte pendant près de 50 ans contre les politiques secrètes de la Russie dégénéra en une « doctrine ésotérique secrète » d’une diplomatie russe « toute puissante » comme le « seul facteur actif de l’histoire moderne » (Engels) –, le travail des fondateurs du marxisme sur cette question fut toujours basé sur une approche matérialiste, scientifique et historique. Cette méthode démasqua l’ « ordre jésuite » caché de la Russie et de la diplomatie occidentale et démontra que les sociétés secrètes des classes dominantes étaient le produit de l’absolutisme et des « lumières » du 18e siècle, pendant lequel la royauté imposa une collaboration entre la noblesse déclinante et la bourgeoisie ascendante. L’ « internationale artistocratique-bourgeoise des lumières » à laquelle se référait Engels dans ses articles sur la politique étrangère tsariste, fournit aussi la base sociale pour la franc-maçonnerie qui surgit en Grande-Bretagne, le pays classique du compromis entre l’artistocratie et la bourgeoisie. Alors que l’aspect bourgeois de la franc-maçonnerie attira beaucoup de révolutionnaires bourgeois au 18e et au début du 19e siècle, particulièrement en France et aux Etats-Unis, son caractère profondément réactionnaire en fit très tôt une arme surtout dirigée contre la classe ouvrière. Ce fut le cas après le soulèvement socialiste de la classe ouvrière qui poussa rapidement la bourgeoisie à abandonner l’athéisme matérialiste de sa propre jeunesse révolutionnaire. Dans la seconde moitié du 19e siècle, la franc-maçonnerie européenne, qui avait été surtout jusque là le divertissement d’une aristocratie qui s’ennuyait parce qu’elle avait perdu sa fonction sociale, devint de plus en plus un bastion du nouvel athéisme anti-matérialiste de la bourgeoisie dirigé essentiellement contre le mouvement ouvrier. Au sein du mouvement maçonnique, toute une série d’idéologies se développèrent contre le marxisme, idéologies qui devaient devenir plus tard le dénominateur commun des mouvements contre-révolutionnaires du 20e siècle. Selon une de ces idéologies, le marxisme lui-même était une création de l’aile « illuminée » de la franc-maçonnerie allemande contre laquelle les « vrais » franc-maçons devaient se mobiliser. Bakounine, lui-même franc-maçon actif, fut le père d’une autre de ces allégations que le marxisme était une « conspiration juive » : « Tout ce monde juif, comprenant une seule secte dominante, une espèce de gens suceurs de sang, une sorte de parasite collectif, destructif, organique, qui va au-delà non seulement des frontières des Etats mais aussi des opinions politiques, ce monde est maintenant, au moins pour sa plus grande partie, à la disposition de Marx d’un côté, et de Rotschild de l’autre (...) Ceci peut paraître étrange. Que peut-il y avoir de commun entre le socialisme et une grande banque ? Le point est que le socialisme autoritaire, le communisme marxiste, exige une forte centralisation de l’Etat. Et là où il y a centralisation de l’Etat, il doit nécessairement y avoir une banque centrale, et là où existe une telle banque on trouvera la nation juive parasite spéculant avec le Travail du peuple. » ([3])
Au contraire de la vigilance des 1re, 2e et 3e Internationales sur ces questions, une partie importante du milieu révolutionnaire actuel se contente d’ignorer ce danger ou de railler la prétendue vision « machiavélique » de l’histoire du CCI. Cette sous-estimation, liée à une ignorance évidente d’une partie importante de l’histoire du mouvement ouvrier, est le résultat de 50 ans de contre-révolution, qui ont interrompu la transmission de l’expérience organisationnelle marxiste d’une génération à l’autre.
Cette faiblesse est d’autant plus dangereuse que l’utilisation au cours de ce siècle des sectes et idéologies mystiques a atteint des dimensions allant beaucoup plus loin que la simple question de la franc-maçonnerie posée dans la phase ascendante du capitalisme. Ainsi, la majorité des sociétés secrètes anti-communistes, qui furent créées entre 1918 et 1923 contre la révolution allemande, n’avaient pas toute leur origine dans la franc-maçonnerie mais furent montées de toutes pièces par l’armée, sous le contrôle d’officiers démobilisés. En tant qu’instruments directs de l’Etat capitaliste contre la révolution communiste, elles furent démantelées dès que le prolétariat fut défait. De même, depuis la fin de la contre-révolution à la fin des années 1960, la franc-maçonnerie classique n’est qu’un aspect de tout un dispositif de sectes religieuses, ésotériques, racistes, aux idéologies, qui déclarent la guerre au matérialisme et au concept de progrès historique, avec une influence considérable dans les pays industrialisés. Ce dispositif constitue une arme supplémentaire de la bourgeoisie contre la classe ouvrière.
La Première Internationale contre les sociétés secrètes
Déjà la Première Internationale a été la cible d'attaques enragées de la part de l'occultisme. Les adeptes du mysticisme catholique des carbonaristes et du mazzinisme étaient des adversaires déclarés de l'Internationale. A New York, les adeptes de l'occultisme de Virginia Woodhull essayèrent d'introduire le féminisme, l' « amour libre » et les « expériences parapsychologiques » dans les sections américaines. En Grande-Bretagne et en France, les loges maçonniques de l'aile gauche de la bourgeoisie, appuyées par les agents bonapartistes, organisèrent une série de provocations visant à discréditer l'Internationale et à permettre l'arrestation de ses membres, ce qui obligea le Conseil Général à exclure Pyat et ses partisans, et à les dénoncer publiquement. Mais le plus grand danger est venu de l'Alliance de Bakounine, une organisation secrète dans l'Internationale qui, avec les différents niveaux d' « initiation » de ses membres « aux secrets » et avec ses méthodes de manipulation (le Catéchisme révolutionnaire de Bakounine) reproduisait exactement l'exemple de la franc-maçonnerie.
On connaît bien l'énorme engagement que Marx et Engels ont manifesté pour repousser ces attaques, pour démasquer Pyat et ses partisans bonapartistes, pour combattre Mazzini et les actions de Woodhull, et par-dessus tout pour mettre à nu le complot de l'Alliance de Bakounine contre l'Internationale (voir la Revue Internationale n °84 et 85). La pleine conscience qu'ils avaient de la menace que constitue l'occultisme se retrouve dans la résolution proposée par Marx lui-même, adoptée par le Conseil général, sur la nécessité de combattre les sociétés secrètes. A la conférence de Londres de L'AIT, en septembre 1871, Marx insistait sur le fait que « ce type d'organisation se trouve en contradiction avec le développement du mouvement prolétarien, à partir du moment où ces sociétés, au lieu d'éduquer les ouvriers, les soumettent à leur lois autoritaires et mystiques qui entravent leur indépendance et entraînent leur conscience dans une fausse direction. » (Marx-Engels, Oeuvres)
La bourgeoisie aussi a essayé de discréditer le prolétariat à travers les allégations des médias suivant lesquelles l'Internationale et la Commune de Paris auraient toutes deux été organisées par une direction secrète de type maçonnique. Dans une interview au journal The New York World, qui suggérait que les ouvriers étaient les instruments d'un « conclave » d'audacieux conspirateurs présents au sein de la Commune de Paris, Marx déclarait : « Cher monsieur, il n'y a pas de secret à éclaircir... à moins que ce ne soit le secret de la stupidité humaine de ceux qui ignorent obstinément le fait que notre Association agit en public, et que des rapports développés de nos activités sont publiés pour tous ceux qui veulent les lire. » La Commune de Paris, selon la logique du World, « pourrait également avoir été une conspiration des francs-maçons car leur contribution n'a pas été petite. Je ne serais vraiment pas étonné si le pape venait à leur attribuer toute la responsabilité de l'insurrection. Mais envisageons une autre explication. L'insurrection de Paris a été faite par les ouvriers parisiens. »
Le combat contre le mysticisme dans la Deuxième Internationale
Avec la défaite de la Commune de Paris et la mort de l'Internationale, Marx et Engels ont appuyé le combat pour soustraire de l'influence de la franc-maçonnerie des organisations ouvrières dans des pays comme l'Italie, l'Espagne ou les Etats-Unis (les « Chevaliers du Travail »). La Deuxième Internationale, fondée en 1889, était, au début, moins vulnérable que la précédente à l'infiltration occultiste, car elle avait exclu les anarchistes. L'ouverture même du programme de la Première Internationale avait permis à des « éléments déclassés de s'y faufiler et d'établir, en son coeur même, une société secrète dont les efforts, au lieu d'être dirigés contre la bourgeoisie et les gouvernements existants, l'étaient contre l'Internationale elle-même. » (Rapport sur l'Alliance au congrès de La Haye, 1872)
Alors que la Deuxième Internationale était moins perméable sur ce plan, les attaques ésotériques commencèrent, non pas au moyen d'une infiltration organisationnelle, mais à travers une offensive idéologique contre le marxisme. A la fin du 19e siècle, la franc-maçonnerie allemande et autrichienne se vantait d'avoir réussi à libérer les universités et les cercles scientifiques du « fléau du matérialisme ». Avec le développement des illusions réformistes et de l'opportunisme dans le mouvement ouvrier, au début du siècle, c'est à partir de ces scientifiques d'Europe centrale que le mouvement bernsteinien adopta « la découverte » du « dépassement du marxisme » par l'idéalisme et l'agnosticisme néo-kantien. Dans le contexte de la défaite du mouvement prolétarien en Russie après 1905, la maladie de la « construction de Dieu » pénétra jusque dans les rangs du bolchevisme, d'où elle fut néanmoins rapidement éradiquée. Au sein de l'Internationale comme un tout, la gauche marxiste développa une défense héroïque et brillante du socialisme scientifique, sans pour autant être capable de stopper l'avancée de l'idéalisme, si bien que la franc-maçonnerie commença à gagner des adeptes dans les rangs des partis ouvriers. Jaurès, le fameux leader ouvrier français, défendait ouvertement l'idéologie de la franc-maçonnerie contre ce qu'il appelait « l'interprétation économiste pauvre et étroitement matérialiste de la pensée humaine » du révolutionnaire marxiste Franz Mehring. Dans le même temps, le développement de l'anarcho-syndicalisme en réaction au réformisme ouvrit un nouveau champ pour le développement d'idées réactionnaires, parfois mystiques, basées sur les écrits de philosophes comme Bergson, Nietzsche (celui-ci s'étant qualifié lui-même de « philosophe de l'ésotérisme ») ou Sorel. Cela, en retour, affecta des éléments anarchistes au sein de l'Internationale comme Hervé en France ou Mussolini en Italie qui, à l'éclatement de la guerre, s'en allèrent rejoindre les organisations de l'extrême-droite de la bourgeoisie.
Les marxistes tentèrent en vain d'imposer une lutte contre la franc-maçonnerie dans le parti français, ou d'interdire aux membres du parti en Allemagne une « seconde loyauté » pour ce type d'organisations. Mais, dans la période d'avant 1914, ils ne furent pas assez forts pour imposer des mesures organisationnelles semblables à celles que Marx et Engels avaient fait adopter dans l'AIT.
La Troisième Internationale contre la franc-maçonnerie
Déterminé à surmonter les faiblesses organisationnelles de la deuxième internationale qui favorisèrent sa faillite en 1914, le Komintern a lutté pour l'élimination totale des éléments « ésotériques » de ses rangs. En 1922, face à la l'infiltration au sein du Parti communiste français d'éléments appartenant à la franc-maçonnerie et qui ont gangréné le parti dès sa fondation au congrès de Tours, le 4e congrès de l'Internationale Communiste, dans sa « Résolution sur la question française » devait réaffirmer les principes de classe dans les termes suivants :
« L'incompatibilité de la franc-maçonnerie et du socialisme était considérée comme évidente dans la plupart des partis de la Deuxième Internationale (...) Si le deuxième Congrès de l'Internationale Communiste n'a pas formulé, dans les conditions d'adhésion à l'Internationale, de point spécial sur l'incompatibilité du communisme et de la franc-maçonnerie, c'est parce que ce principe a trouvé sa place dans une résolution séparée votée à l'unanimité du Congrès.
Le fait, qui s'est révélé d'une façon inattendue au 4e Congrès de l'Internationale Communiste, de l'appartenance d'un nombre considérable de communistes français aux loges maçonniques est, aux yeux de l'Internationale Communiste, le témoignage le plus manifeste et en même temps le plus pitoyable que notre Parti français a conservé, non seulement l'héritage psychologique de l'époque du réformisme, du parlementarisme et du patriotisme, mais aussi des liaisons tout à fait concrètes, extrêmement compromettantes pour la tête du Parti, avec les institutions secrètes, politiques et carriéristes de la bourgeoisie radicale (...)
L'Internationale considère comme indispensable de mettre fin, une fois pour toutes, à ces liaisons compromettantes et démoralisatrices de la tête du Parti Communiste avec les organisations politiques de la bourgeoisie. L'honneur du prolétariat de France exige qu'il épure toutes ses organisations de classe des éléments qui veulent appartenir à la fois aux deux camps en lutte.
Le Congrès charge le Comité Directeur du Parti Communiste français de liquider avant le 1er janvier 1923 toutes les liaisons du Parti, en la personne de certains de ses membres et de ses groupes, avec la franc-maçonnerie. Celui qui, avant le 1er janvier, n'aura pas déclaré ouvertement à son organisation et rendu publique par la presse du Parti sa rupture complète avec la franc-maçonnerie est, par là-même, automatiquement exclu du Parti communiste sans droit d'y jamais adhérer à nouveau, à quelque moment que ce soit. La dissimulation par quiconque de son appartenance à la franc-maçonnerie sera considérée comme pénétration dans le Parti d'un agent de l'ennemi et flétrira l'individu en cause d'une tache d'ignominie devant tout le prolétariat. »
Au nom de l'internationale, Trotsky dénonça l'existence de liens entre la « franc-maçonnerie et les institutions du parti, le comité de rédaction, le comité central » en France.
« La ligue des droits de l'homme et la franc-maçonnerie sont des instruments de la bourgeoisie qui font diversion à la conscience des représentants du prolétariat français. Nous déclarons une guerre sans pitié à ces méthodes car elles constituent une arme secrète et insidieuse de l'arsenal bourgeois. On doit libérer le parti de ces éléments. » (Trotsky, La voix de l'Internationale : le mouvement communiste en France)
De façon similaire, le délégué du Parti communiste allemand (KPD) au 3e congrès du Parti Communiste italien à Rome, en se référant aux thèses sur la tactique communiste soumises par Bordiga et Terracini, affirmait : « Le caractère irréconciliable évident entre l'appartenance simultanée au Parti Communiste et à un autre Parti, s'applique, en dehors de la pratique politique, aussi à ces mouvements qui, en dépit de leur caractère politique, n'ont pas le nom ni l'organisation d'un parti (...) on trouve ici en particulier la franc-maçonnerie. » (« Les thèses italiennes », Paul Butcher dans L'Internationale, 1922)
Le développement vertigineux des sociétés secrètes dans la décadence capitaliste
L'entrée du capitalisme dans sa phase de décadence depuis la première guerre mondiale a entraîné un gigantesque développement de l'Etat capitaliste et en particulier de ses appareils militaires et répressifs (espionnage, police secrète, etc.). Cela implique-t-il que la bourgeoisie n'avait plus besoin de ses sociétés secrètes « traditionnelles » ? Ce fut en partie le cas. Là où le totalitarisme de l'Etat capitaliste décadent a pris une forme brutale et non dissimulée comme dans l'Allemagne hitlérienne, l'Italie de Mussolini ou la Russie de Staline, les loges maçonniques ou autres, ou les regroupements secrets furent également interdits.
Cependant, même ces formes brutales de capitalisme ne peuvent complètement se dispenser d'un appareil parallèle, sans existence officielle, secret ou illégal. Le totalitarisme du capitalisme d'Etat implique le contrôle dictatorial de l'Etat bourgeois, pas seulement sur toute l'économie, mais sur l'ensemble des aspects de la vie sociale. Ainsi, dans les régimes staliniens, la mafia constitue une partie indispensable de l'Etat, dans la mesure où elle contrôle la seule partie de l'appareil de distribution qui fonctionne réellement, mais qui officiellement est supposée ne pas exister : le marché noir. Dans les pays de l'ouest, la criminalité organisée est une partie du régime de capitalisme d'Etat non moins indispensable.
Mais sous cette forme de capitalisme d'Etat prétendument démocratique, les appareils de repression et d'infiltration tant officiels que non officiels ont connu un développement pharamineux.
Sous son maquillage démocratique, l'Etat impose sa politique sur les membres de sa propre classe et combat les organisations de ses rivaux impérialistes et celles de son ennemi de classe prolétarien d'une manière pas moins totalitaire que sous le nazisme ou le stalinisme. Sa police politique officielle et son appareil d'informateurs est tout aussi omniprésent que dans n'importe quel autre Etat. Mais alors que l'idéologie « démocratique » ne permet pas à cet appareil d'agir aussi ouvertement que la Gestapo en Allemagne ou la Guépéou en Russie, la bourgeoisie occidentale est amenée à développer et à s'appuyer à nouveau sur ses anciennes traditions de franc-maçonnerie ou de mafia politique, mais cette fois sous le contrôle direct de l'Etat. Ce que la bourgeoisie occidentale ne fait pas ouvertement et légalement, elle le fait dans l'illégalité et secrètement.
Ainsi, quand l'armée américaine envahit l'Italie de Mussolini en 1943, elle n'amena pas avec elle que la Mafia.
« Dans le sillage des divisions motorisées américaines progressant vers le Nord, les loges maçonniques se développèrent comme des champignons après la pluie. Ce n'était pas seulement une réaction au fait que précédemment elles avaient été interdites par Mussolini qui avait persécuté leurs membres. Les puissants regroupements maçonniques américains participèrent à ce développement, en prenant immédiatement sous leur coupe leurs frères italiens. » ([4])
Ici se trouve l'origine de l'une des plus fameuses parmi les innombrables organisations parallèles de la bourgeoisie occidentale, la Loge de la Propagande Due (Loge P2) en Italie. Ces structures non officielles coordonnèrent la lutte des différentes bourgeoisies nationales et du bloc américain contre l'influence du bloc soviétiques rival, dans tous les aspects de la vie sociale. De telles loges recrutent aussi parmi les leaders de l'aile gauche de l'Etat capitaliste, dans les partis staliniens et gauchistes, dans les syndicats.
Une série de scandales et révélations (liés à l'éclatement du bloc de l'est après 1989) ont fait apparaître au grand jour le travail qu'assumaient de tels regroupements, au profit de l'Etat, dans la lutte contre l'ennemi impérialiste. Mais un secret de la bourgeoisie demeure soigneusement dissimulé encore : c'est le fait que, dans la décadence, sa vieille tradition d'infiltration maçonnique des organisations ouvrières a aussi fait partie du répertoire de l'appareil d'Etat du totalitarisme démocratique. Cela fut le cas à chaque fois que le prolétariat a sérieusement menacé la bourgeoisie : tout au long de la vague révolutionnaire de 1917-23, mais aussi depuis 1968 avec la fin de la contre-révolution qui a suivi la défaite de cette vague.
Un appareil contre-révolutionnaire parallèle
Comme Lénine l'a souligné, la révolution prolétarienne en Europe occidentale à la fin de la première guerre mondiale était confrontée à une classe dominante plus puissante et plus intelligente qu'en Russie. Comme en Russie, la bourgeoisie occidentale, face à la vague révolutionnaire, a joué immédiatement la carte démocratique en mettant au pouvoir la gauche, c’est-à-dire les anciens partis ouvriers, en annonçant la tenue d'élections ainsi que des projets pour la « démocratie industrielle » et pour « intégrer » les conseils ouvriers dans la constitution et l'Etat.
Mais la bourgeoisie occidentale est allée au delà de ce qu'a fait l'Etat russe après février 1917. Elle a commencé immédiatement à construire un gigantesque appareil contre-révolutionnaire parallèle à ses structures officielles.
A cette fin, elle a mis à profit l'expérience politique et organisationnelle des loges maçonniques et des ordres de la droite populaire qui s'étaient spécialisés dans le combat contre le mouvement socialiste avant la guerre mondiale, achevant ainsi leur intégration dans l'Etat. Une organisation de ce type, l' « Ordre Germanique » et « la Ligue du Marteau », fut fondée en 1912 en réponse à l'imminence de la guerre et à la victoire électorale du parti socialiste. Elle affirmait dans son journal son but « d'organiser la contre-révolution ». « La sainte vendetta liquidera les leaders révolutionnaires au tout début de l'insurrection, sans hésiter à lutter contre les masses criminelles avec leurs propres armes. » ([5])
Victor Serge fait référence aux services secrets de l' « Action Française » et des « cahiers de l'anti-France » qui renseignaient sur les mouvements d'avant-garde en France déjà pendant la guerre ; il parle des informateurs et services de provocateurs des partis fascistes en Italie et des agences de détectives privés aux Etats-Unis qui « fournissent à volonté aux capitalistes des mouchards discrets, des provocateurs experts, des tireurs d'élite, des gardes, des contremaîtres et aussi des militants syndicaux corrompus à souhait » (édition française). Et la compagnie Pinkerton est supposée employer 135 000 personnes.
« En Allemagne, les forces vitales de la réaction se concentrent, depuis le désarmement officiel du pays, dans les organisations plus qu'à demi secrètes. La réaction a compris que même aux partis secondés par l'Etat, la clandestinité est une ressource précieuse. Contre le prolétariat, il va de soi que toutes ces organisations assument plus ou moins les fonctions d'une police occulte. » ([6])
Afin de ne pas affaiblir le mythe de la démocratie, ces organisations contre-révolutionnaires en Allemagne et dans d'autres pays n'appartenaient pas officiellement à l'Etat. Elles avaient des sources de financement privées. Certaines étaient même déclarées illégales, se présentaient elles-mêmes comme ennemies de la démocratie et allaient jusqu'à assassiner des leaders « démocrates » bourgeois comme Rathenau et Erzberger, et commettre des putschs de droite (Putsch de Kapp en 1920, d'Hitler en 1923). Elles purent ainsi jouer un rôle primordial de mystification du prolétariat en le précipitant dans la défense de la contre-révolutionnaire « démocratie » de Weimar.
Le réseau contre la révolution prolétarienne
C'est à travers l'expérience en Allemagne, qui était le principal centre hors de Russie de la vague révolutionnaire de 1917-23, qu'on peut le mieux appréhender l'ampleur des opérations contre-révolutionnaires que mène la bourgeoisie lorqu'elle sent sa domination de classe menacée. Un gigantesque réseau de défense de l'Etat bourgeois fut mis en place. Ce réseau utilisa la provocation, l'infiltration et le meurtre politique pour soutenir tant les polices contre-révolutionnaires du SPD et des syndicats que la Reichswehr et la non officielle « armée blanche » des corps-francs. L'exemple le plus connu est celui du NSDAP (le parti nazi) qui fut fondé à Munich en 1919 sous le nom de « Parti des travailleurs allemands » pour lutter contre la révolution. Hitler, Göring, Röhm et les autres leaders nazis ont débuté leur carrière politique en tant qu'informateurs et agents contre les conseils ouvriers de Bavière.
Ces centres « illégaux » de la contre-révolution faisaient, en réalité, partie intégrante de l'Etat. Bien que ces spécialistes de l'assassinat, tels les meurtriers de Liebknecht et Luxemburg, et les tortionnaires de centaines de dirigeants communistes, aient été passés en jugement, soit ils furent déclarés non coupable, soit ils obtinrent des peines symboliques, soit ils purent s'échapper. Bien que leurs caches d'armes aient été découvertes par la police, l'armée réclama les armes sous prétexte qu'elles lui avaient été volées.
L’organisation Escherish (« Orgesh »), la plus importante et la plus dangereuse des armées anti-prolétariennes après le putsch de Kapp, ayant pour but déclaré de « liquider le Bolchevisme », « avait près d’un million de membres armés, possédant d’innombrables dépôts d’armes cachés, et travaillant avec les méthodes des services secrets. A cette fin, l’Orgesch a maintenu une agence de renseignement » ([7]). Et le « Teno », soi-disant un service technique intervenant en cas de catastrophe publique, était en réalité une troupe de 170 000 hommes utilisée essentiellement pour briser les grèves.
La Ligue Anti-bolchevique, fondée le 1er décembre 1918 par des industriels, orientait sa propagande en direction des ouvriers. « Elle suivit attentivement le développement du KPD (Parti communiste allemand) et essaya de l’infiltrer au moyen de ses informateurs. C’est à cette fin qu’elle mit en place un réseau d’informateurs camouflé derrière le nom de quatrième département. Elle maintint des liens avec la police politique et des unités de l’armée. » ([8])
A Munich l’occulte société de Thulé, liée à l’Ordre Germanique d’avant-guerre cité précédemment, créa l’armée blanche de la bourgeoisie bavaroise, les corps-francs Oberland, coordonna la lutte contre la république des conseils en 1919, et prit en charge le meurtre de Eisner, un dirigeant de l’USPD, dans le but de provoquer un insurrection prématurée. « Son deuxième département était son service de renseignement, avec une activité organisée et étendue d’infiltration, d’information et de sabotage. Selon Sebottendorff, chaque membre de la ligue de combat avait rapidement et sous un autre nom une carte de membre du groupe Spartacus. Les informateurs de la Ligue de Combat siégeaient également dans les comités du gouvernement des conseils et de l’armée rouge, et rapportaient chaque soir au centre de la société de Thulé les plans de l’ennemi. » ([9])
L'arme principale de la bourgeoisie contre la révolution prolétarienne n'est ni la répression ni la subversion mais l'influence idéologique et organisationnelle de ses organisations de « gauche » dans les rangs du prolétariat. C'est ce rôle essentiel qu'ont joué la social-démocratie et les syndicats. Mais le poids du soutien qu'ont représenté l'infiltration et la provocation aux efforts de la gauche du capital contre le combat des ouvriers fut particulièrement révélé par le « National-Bolchévisme » durant la révolution allemande. Influencée par le pseudo anti-capitalisme, le nationalisme extrémiste, l'antisémitisme et l'anti-libéralisme des organisations parallèles de la bourgeoisie, avec lesquelles elle tenait des réunions secrètes, la prétendue « gauche » de Hambourg autour de Laufenberg et Wollfheim a développé une version contre-révolutionnaire du « communisme de gauche » qui a contribué de façon décisive à diviser le tout nouveau KPD en 1919, et à le discréditer en 1920.
Le travail d'infiltration bourgeoise au sein de la section de Hambourg du KPD commença déjà à être découvert par le parti en 1919 quand furent démasqués environ 20 agents de la police directement en lien avec le GKSD, un régiment contre-révolutionnaire de Berlin. « A partir de là eurent lieu des tentatives répétées pour pousser les ouvriers de Hambourg à se lancer dans des attaques armées de prisons ou dans d'autres actions aventuristes. » ([10])
L'organisateur de ce travail de sape contre les communistes de Hambourg, Von Killinger, devint peu de temps après un dirigeant de l' « Organisation Consul », une organisation secrète terroriste et criminelle financée par les junkers, dont le but était l'infiltration des organisations communistes et l'unification de la lutte de tous les autres groupes de droite contre le communisme.
La défense de l'organisation révolutionnaire
Au début de cet article, nous avons vu comment les communistes internationalistes tirèrent les leçons de l'incapacité qu'avait eue la deuxième Internationale à mener un combat plus rigoureux au niveau organisationnel contre la franc-maçonnerie et les sociétés secrètes.
Déjà, le deuxième congrès mondial de l'Internationale communiste, en 1920, avait adopté une motion du parti italien contre les francs-maçons, motion qui officiellement ne faisait pas partie des « 21 conditions » pour adhérer à l'internationale mais qui officieusement était connue comme la 22e condition. En fait, les fameuses 21 conditions d'août 1920 obligèrent toutes les sections de l'Internationale à organiser des structures clandestines pour protéger l'organisation face à l'infiltration, pour faire des investigations en direction des activités de l'appareil illégal contre-révolutionnaire de la bourgeoisie. Elles les amenèrent également à soutenir le travail centralisé internationalement qui était dirigé contre les actions politiques et répressives du capital.
Le troisième congrès en juin 1921 adopta des principes destinés à mieux protéger l'Internationale contre les informateurs et agents provocateurs, par l'observation systématique des activités, officielles et secrètes, de la police, de l'appareil paramilitaire, des francs-maçons, etc. Un comité spécial, l'OMS, fut créé pour coordonner internationalement ce travail.
Le KPD, par exemple, publiait régulièrement des listes d'agents provocateurs et d'informateurs de la police exclus de ses rangs, avec leur photo et la description de leur méthodes. « D'août 1921 à août 1922 le département d'information démasqua 124 informateurs, agents provocateurs et escrocs. Soit ils avaient été envoyés dans le KPD par la police ou des organisations de droite, soit ils avaient espéré exploiter financièrement le KPD pour leur propre compte. » (4)
Des brochures furent préparées sur cette question. Le KPD découvrit aussi qui avait tué Liebknecht et Luxemburg, publia les photos des assassins et demanda l'aide de la population pour les pourchasser. Une organisation spéciale fut créée pour défendre le parti contre les sociétés secrètes et les organisations paramilitaires de la bourgeoisie. Ce travail incluait des actions spectaculaires. Ainsi, en 1921, des membres du KPD, déguisés en policiers, perquisitionnèrent les locaux d'un bureau de l'armée blanche russe à Berlin et confisquèrent les papiers. Des attaques surprises furent menées contre les bureaux secrets de la criminelle « Organisation Consul ».
Et surtout, le Kominterm alimentait régulièrement toutes les organisations ouvrières en avertissements concrets et en informations sur les experts du bras occulte de la bourgeoisie afin de l'anéantir.
Après 1968 : la renaissance des manipulations occultes contre le prolétariat
Avec la défaite de la révolution communiste après 1923, le réseau secret anti-prolétarien de la bourgeoisie fut soit dissout soit affecté à d'autres tâches par l'Etat. En Allemagne, beaucoup de ces éléments furent plus tard intégrés dans le mouvement nazi.
Mais quand les luttes ouvrières massives de 1968 en France mirent fin à 50 ans de contre-révolution et ouvrirent une nouvelle période de développement de la lutte de classe, la bourgeoisie commença à réactiver son appareil caché anti-prolétarien. En mai 1968 en France, « le Grand Orient salua avec enthousiasme le magnifique mouvement des étudiants et des ouvriers et envoya de la nourriture et des médicaments à la Sorbonne occupée. » ([11])
Ce « salut » n'était qu'hypocrisie. Dès après 1968, en France, la bourgeoisie va mettre en branle ses sectes « néo-templières », « rosicruciennes » et « martinistes » dans le but d'infiltrer les groupes gauchistes et autres, en collaboration avec les structures du SAC (le Service d'Action Civique, créé par les hommes de main de De Gaulle). Par exemple, Luc Jouret, le gourou du « Temple solaire », a commencé sa carrière d'agent d'officines parallèles semi-légales en infiltrant des groupes maoïstes ([12]), avant de se retrouver en 1978 comme médecin parmi les parachutistes belges et français qui sautèrent sur Kolwesi au Zaïre.
En fait, les années suivantes apparurent des organisations du type de celles utilisées contre la révolution prolétarienne dans les années 1920. A l'extrême-droite, le Front Européen de Libération a fait renaître la tradition du National-Bolchevisme. En Allemagne, le front Ouvrier Social Révolutionnaire, suivant sa devise : « la frontière n'est pas entre la gauche et la droite, mais entre au-dessus et en dessous », se spécialise dans l'infiltration de différentes organisations de gauche. La Loge de Thulé a également été refondée comme société secrète contre-révolutionnaire. ([13])
Parmi les services de renseignement privés de la droite moderne on trouve ceux de la Ligue Mondiale Anticommuniste, ceux du Comité du Travail ou encore ceux du Parti Européen du Travail dont le leader Larouche est décrit par un membre du Conseil National de Sécurité des Etats Unis comme ayant « le meilleur service privé de renseignement du monde. » ([14]) En Europe, certaines sectes rosicruciennes sont d'obédience américaine, d'autres d'obédience européenne telle que l' « Association Synarchique d'Empire » dirigée par la famille des Habsbourg qui a régné sur l'Europe à travers l'empire austro-hongrois.
Des versions de gauche de telles organisations contre-révolutionnaires ne sont pas moins actives. En France, par exemple, des sectes se sont constituées dans la tradition « martiniste », une variante de la franc-maçonnerie qui, dans l'histoire, s'est spécialisée dans les missions secrètes d'agents d'influence complétant le travail des services secrets officiels ou dans l'infiltration et la destruction des organisations ouvrières. De tels groupes propagent l'idée que le communisme soit n'explique pas tout et doit être enrichi ([15]), soit qu'il peut être instauré plus sûrement par les manipulations d'une minorité éclairée. Comme d'autres sectes, ils sont spécialisés dans l'art de la manipulation des personnes, pas seulement leur comportement individuel mais surtout leur action politique.
Plus généralement, le développement de sectes occultes et de regroupements ésotériques dans les dernières années n'est pas seulement l'expression du désespoir et de l'hystérie de la petite-bourgeoisie face à la situation historique mais est encouragé et organisé par l'Etat. Le rôle de ces sectes dans les rivalités impérialistes est connu (cf. l'utilisation de l'Eglise de Scientologie par la bourgeoisie américaine contre l'Allemagne). Mais tout ce mouvement « ésotérique » fait également partie de l'attaque idéologique de la bourgeoisie contre le marxisme, particulièrement depuis 1989 avec la prétendue « mort du communisme ». Historiquement, c'est face au développement du mouvement socialiste que la bourgeoisie européenne commença à s'identifier avec l'idéologie mystique de la franc-maçonnerie, particulièrement après la révolution de 1848. Aujourd'hui la haine profonde de l'ésotérisme envers le matérialisme et le marxisme, aussi bien qu'envers les masses prolétariennes considérées comme « matérialistes » et « stupides », n'est rien d'autre que la haine que concentrent la bourgeoisie et la petite-bourgeoisie face au prolétariat non vaincu. Incapable elle-même d'offrir aucune alternative historique, la bourgeoisie oppose au marxisme le mensonge selon lequel le stalinisme était du communisme mais aussi la vision mystique suivant laquelle le monde ne pourra être « sauvé » que lorsque la conscience et la rationalité auront été remplacées par les rituels, l'intuition et les supercheries.
Aujourd'hui, face au développement du mysticisme et à la prolifération des sectes occultes dans la société capitaliste en décomposition, les révolutionnaires doivent tirer les leçons de l'expérience du mouvement ouvrier contre ce que Lénine appelait « le mysticisme, ce cloaque pour les modes contre-révolutionnaires. » Ils doivent se réapproprier cette lutte implacable menée par les marxistes contre l'idéologie franc-maçonne. Ils doivent « rendre la honte plus honteuse encore en la livrant à la publicité » (comme le disait Marx) en dénonçant fermement ce type d'idéologie réactionnaire.
Au même titre que la religion, qualifiée par Marx au siècle dernier, d' « opium du peuple » les thèmes idéologiques de la franc-maçonnerie moderne sont un poison distillé par l'Etat bourgeois pour détruire la conscience de classe du prolétariat.
Le fait que le mouvement ouvrier du passé ait dû mener un combat permanent contre l'occultisme est assez peu connu aujourd'hui. En réalité, l'idéologie et les méthodes d'infiltration secrète de la franc-maçonnerie ont toujours été un des fers de lance des tentatives de la bourgeoisie pour détruire, de l'intérieur, les organisations communistes. Si le CCI, comme beaucoup d'organisations révolutionnaires du passé, a subi la pénétration en son sein de ce type d'idéologie, il est de son devoir et de sa responsabilité de communiquer à l'ensemble du milieu politique prolétarien les leçons du combat qu'il a mené pour la défense du marxisme, de contribuer à la réappropriation de la vigilance du mouvement ouvrier du passé face à la politique d'infiltration et de manipulation par l'appareil occulte de la bourgeoisie.
[1]. Voir l’avertissement publié à ce sujet dans toute la presse territoriale du CCI.
[2]. Voir La politique étrangère de la Russie tsariste, Engels.
[3]. .Bakounine, cité par R. Huch, Bakunin und die Anarchie (Bakounine et l’anarchie).
[4]. Terror, Drahtzieher und Attentäter (Terreur, manipulateurs et assasins), Kowaljow-Mayschew. La version est-allemande du livre soviétique fut publiée par les éditeurs militaires de la RDA.
[5]. Die Thule-Gesellschaft (L’histoire de la Loge de Thulé), Rose.
[6]. Ce que tout révolutionnaire doit savoir de la répression, V. Serge.
[7]. Der Nachrichtendienst der KPD (Les services de renseignement du KPD), publié en 1993 par d'anciens historiens de la police secrète de l’Allemagne de l’Est, la STASI.
[8]. Idem.